Cigarette électronique : doit-on l’interdire dans les lieux publics ?

Cigarette électronique
Crédit photo : http://www.ecigclick.co.uk/

Numéro 1

S’informer

Qu'est ce qu'une cigarette électronique et comment ça fonctionne ?

Une cigarette électronique ou e-cigarette est un dispositif générant un aérosol ou « vapeur » qui peut être inhalé. Cet aérosol est créé à partir d’un liquide stocké dans le dispositif.

La technique la plus répandue consiste à chauffer le liquide à l’aide d’une résistance appelée « atomiseur ». L’utilisateur de la cigarette électronique doit actionner un bouton ou tout simplement aspirer pour enclencher la résistance. Le liquide se met alors à chauffer jusqu’à se transformer en vapeur que l’on peut alors inhaler.

Le liquide utilisé se compose d’un mélange de propylène glycol ou de glycérine végétale, d’arômes industriels et de nicotine dont le taux est variable (généralement entre 0 et 40 mg/ml).

Combien y a-t-il d'utilisateurs en France ?

D’après une enquête réalisée par l’Observatoire Français des Drogues et des Toxicomanies (OFDT), l’utilisation quotidienne de la cigarette électronique concerne 3% de la population, soit entre 1,1 et 1,9 million de personnes.

A titre de comparaison, on estime à 13,4 millions le nombre de consommateur quotidien de tabac.

Pourquoi en parle-t-on ?

Le volet anti-tabac du projet de loi santé actuellement en débat à l’Assemblée Nationale prévoit de restreindre la vente et l’utilisation des cigarettes électroniques. Il prévoit notamment d’interdire l’usage des e-cigarettes dans les lieux publics.

Numéro 2

Se positionner

Le principe du Drenche est de présenter l’actualité sous forme de débats. Le but est qu’en lisant un argumentaire qui défend le « pour » et les arguments du camp du « contre », vous puissiez vous forger une opinion ; votre opinion.

Quelle est votre opinion avant de lire cet article ?
LE « POUR »

Oui à la cigarette électronique mais pas partout

Billet rédigé par :

Gérard Dubois

Membre de l’Académie Nationale de Médecine, Président de la Commission Addictions

Le rapport de l’Académie de médecine indique que la cigarette électronique inquiète certains car elle pourrait ne pas être sans danger, être un moyen d’initiation des jeunes à la nicotine, rendre impossible l’application de l’interdiction de fumer du tabac dans les lieux clos et couverts accueillant du public.

Bien qu’encore partielles, les études indiquent que si la cigarette électronique doit être surveillée et réglementée, elle est aussi une opportunité nouvelle. Le développement de son marché s’accompagne d’une baisse de 17% des ventes de tabac depuis 2012, baisse bien plus importante que ne le voudrait la seule augmentation des prix.

 

La position de l’Académie est donc favorable à une cigarette électronique, produit de consommation courante, mais réglementé et surveillé (norme AFNOR en préparation), avec des liquides de moins de 20 mg/ml de nicotine comme le veut une directive européenne. Elle recommande de ne pas dissuader un fumeur qui l’utilise. Elle va plus loin, en recommandant que soient développés des produits avec plus de 20 mg/ml ayant le statut de médicament pour le traitement de la dépendance tabagique.

 

La cigarette électronique n’a d’intérêt que pour le fumeur. La stratégie de santé publique est donc que la vente aux mineurs reste interdite (loi Hamon) ainsi que la publicité grand public. Si la cigarette électronique devient un moyen d’arrêt du tabac reconnu, on pourrait alors appliquer la législation correspondante.

 

Avec la même logique que l’Académie recommande d’interdire de vapoter dans TOUS les lieux où il est (et sera) interdit de fumer. En effet, les fumeurs ont pu, du jour au lendemain, ne plus fumer dans ces endroits, et la fumée (pas les fumeurs heureusement) a disparu de la vue et des poumons des Français. Il a fallu un siècle pour obtenir le retour en France de cette liberté de ne plus être enfumé. Si la fumée de tabac est dangereuse et 3 000 décès annuels lui étaient attribués, il n’en est pas de même pour la vapeur (aérosol) de l’e-cigarette.

 

Cependant, l’interdiction de fumer a eu un effet éducatif en « dénormalisant » la cigarette et la fumée. De plus, nombre de cigarettes électroniques imitent l’aspect de la cigarette tabac (celles fabriquées par l’industrie du tabac notamment), ce qui rendrait difficile, voire impossible l’application de la réglementation.

 

Ce sont les raisons pour lesquelles l’Académie recommande d’aller plus loin que le projet gouvernemental, en interdisant de vapoter partout où il est interdit de fumer..

LE « CONTRE »

L'interdiction, scientifiquement injustifiée, de la meilleure arme contre le tabagisme

Billet rédigé par :

Brice LEPOUTRE

Président de l'AIDUCE (Association Indépendante Des Utilisateurs de Cigarette Electronique)
http://www.aiduce.org/

Le tabac a été interdit en raison du tabagisme passif et des risques pour la santé auxquels était exposé l’entourage du fumeur. La cigarette électronique ne présente aucun risque pour l’entourage, des études le démontrent aujourd’hui, le Professeur Dautzenberg le soulignait déjà en 2013 dans son rapport remis au gouvernement. Il n’y a donc aucune base scientifique permettant d’argumenter cette interdiction.

 

La seule raison désormais évoquée par les gouvernements et l’OMS est l’exemplarité du geste, la normalisation de l’action de fumer. Faut-il aujourd’hui accepter que les citoyens n’aient plus aucune liberté d’agir et se voient dans l’obligation de donner l’exemple quand ce qu’ils font ne pose aucun risque particulier mais à contrario, produit une amélioration notable de la santé des fumeurs préférant la cigarette électronique ?

 

La seule exemplarité que les vapoteurs veulent bien reconnaitre est celle qu’ils apportent aux fumeurs en leur montrant une alternative bien plus saine au tabac, montrer qu’il est possible de se débarrasser facilement du tabac de manière ludique. Si tous les fumeurs se laissaient convaincre par la vape, nous pourrions sans doute voir la fin du tabac … Cette situation est-elle voulue par le gouvernement et les lobbies ? Rien n’est moins sûr.

 

De plus, une telle interdiction maintient le doute dans l’esprit de la population, nous le notons à chaque fois qu’un article sur la cigarette électronique à charge (mais souvent scientifiquement infondé) est publié : soudain, vapoter paraît plus dangereux que fumer pour bon nombre. Interdire le vapotage dans les lieux publics renvoie l’image d’un produit dangereux pour l’entourage, entretenant ainsi le parallèle avec le tabac, et empêchant ceux qui doutent d’essayer une alternative reconnue plus saine.

 

Aujourd’hui, il faut clairement stopper cet amalgame. Ce n’est pas parce qu’il s’agit de « cigarette » électronique que les vapoteurs fument. Fumer, c’est brûler du tabac, libérer des goudrons, du monoxyde de carbone, des particules fines responsables des maladies respiratoires et cardio-vasculaires. Vapoter c’est pulvériser un e-liquide composé de propylène glycol, de glycérine végétale, d’arômes et éventuellement de nicotine. Aucun des produits constituant l’ecigarette n’est cancérogène.

 

Vapoter n’est pas fumer. La vape ne mène pas au tabac mais les vapoteurs risquent d’y revenir à force d’amalgame et de restrictions. Appliquer une interdiction de fumer au vapotage est contre productif pour une politique de santé publique et de réduction des risques.

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