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Le principe du Drenche est de présenter l’actualité sous forme de débats. Le but est qu’en lisant un argumentaire qui défend le « pour » et les arguments du camp du « contre », vous puissiez vous forger une opinion ; votre opinion.
Quand une loi devient nécessaire pour garantir la présence des femmes dans un scrutin de proximité
Agnès Canayer
Sénateur de Seine-MaritimeLa loi de mai 2013 relative à l’élection des conseillers départementaux a imposé la formation de binômes formés d’un homme et d’une femme sur chaque canton. Cette nouvelle organisation garantira l’élection de 50% de conseillères et 50% de conseillers départementaux.
Cette loi a suscité de vifs débats : Est-ce le bon vecteur pour imposer la parité hommes-femmes ? Je me positionne en faveur de cette loi. Oui, Il fallait recourir à la loi pour mettre en place une stricte parité.
En effet, si le principe de la parité semble acquis dans les esprits, force est de constater que les réalités sont différentes, laissant largement en retrait les femmes, par un positionnement peu avantageux sur les listes. Les données des dernières cantonales de 2008 et 2011, qui révèlent que seulement 22% des candidats étaient des femmes, me confortent dans la nécessité d’une loi.
La nouvelle loi garantit la position éligible des femmes. C’est un acte de démocratie corollaire du droit de vote accordé il y a 70 ans.
Pendant la campagne pour les départementales sur mon territoire, qui vient de s’achever, le binôme a été bien accueilli. Et si certains pouvaient craindre de ne pas trouver de candidates, il n’en est rien. Le vivier est grand du fait de l’implication des femmes dans la société, dans le monde associatif et de leur connaissance du terrain.
D’abord à tâtons, la complémentarité entre les candidats s’est mise en place avec intelligence. C’est une complémentarité qui se manifeste par les centres d’intérêts, par les visions et l’appréhension des problématiques qui seront confiées aux nouveaux élus départementaux mais aussi par la connaissance du territoire.
La loi est aussi la garantie du renouvellement de la classe politique, plus jeune, plus féminine. Faisons en un outil de regain de confiance envers les politiques.
Ce sera des citoyens mieux représentés, sur un territoire où la proximité, le pragmatisme et l’empathie propre à la femme sont indispensables eu égard aux compétences départementales.
Bien sûr, les premiers binômes sur les cantons seront scrutés à la loupe, je suis confiante pour ceux qui seront élus sur mon territoire.
Le binôme, invention absurde d'une réforme incompréhensible
François Sauvadet
Ancien Ministre Député de la Côte-d'Or Président du Conseil Généralhttp://www.francois-sauvadet.net/
Le binôme est une invention socialiste quasi unique au monde.
Le condamner, ce n’est pas refuser la parité, au contraire !
Il s’agit simplement de souligner que la désignation par les citoyens de deux candidats « élus ensemble mais exerçant indépendamment l’un de l’autre leur mandat » n’est pas de nature à permettre un exercice clair de leur mandat.
Or, la démocratie, c’est la clarté du choix !
Le binôme s’est révélé incompréhensible et constitue un obstacle à la lisibilité du scrutin. Il risque de créer une instabilité dans le fonctionnement quotidien du Département. Le conseiller départemental est l’interlocuteur de proximité des habitants et des élus locaux. Comment s’y retrouver si les deux élus du même territoire n’ont pas la même position sur une question ?
Cela alourdira les démarches pour les maires des petites communes avec deux interlocuteurs au lieu d’un et un éloignement des centres de décision puisque le binôme a provoqué une division par deux du nombre de cantons en France !
La conséquence, c’est aussi la disparition d’environ 2 000 chefs-lieux de cantons, avec un sentiment d’abandon accru pour les habitants ruraux.
Au-delà du binôme, c’est l’économie générale de ce charcutage électoral qui pose problème : création de cantons géants dans lesquels on trouve parfois plus de 100 communes, disparition des chefs-lieux de canton, illisibilité du scrutin pour les citoyens, découpage de confort pour le Parti Socialiste au détriment de la cohérence territoriale…
Le Parti Socialiste est le Parti des métropoles où se concentre ce qu’il reste de son électorat et les territoires ruraux constituent son angle mort. La mise en place du binôme confirme cela. Dans les grandes villes, le lien entre les habitants et leur conseiller départemental n’a pas la même intensité. C’est ce qui explique pourquoi le Gouvernement refuse de voir à quel point le binôme est facteur de désordre, d’incompréhension et de colère sourde.
Le binôme étant inscrit dans la loi, nous nous y conformons, mais nous regrettons profondément cette décision absurde.