📋 Le contexte 📋
Le Sahara occidental compte environ 600 000 habitants dans un espace de 266 000 km2 au Nord-Ouest de l’Afrique. De 1884 à 1975, cette zone désertique au littoral très poissonneux est placée sous le protectorat espagnol. De 1965 à 1973, l’ONU exhorte l’Espagne à décoloniser le Sahara occidental et à tout mettre en œuvre pour le droit à l’autodétermination des Sahraouis. En 1973, le mouvement politique et armé du Front Polisario est fondé pour obtenir l’indépendance et combattre l’occupation espagnole.
L’année suivante, l’Espagne enclenche le processus de décolonisation et promet un référendum au Sahara occidental. Le Maroc s’oppose à cette initiative et le roi Hassan II lance la « Marche verte » le 6 novembre 1975. Environ 350 000 Marocains traversent la frontière dans le but de récupérer le territoire. À la suite de cet évènement, l’Espagne signe les accords de Madrid avec le Maroc et la Mauritanie pour céder le Sahara occidental et le partager entre les deux pays.
Soutenu dans cette démarche par l’Algérie, le Front Polisario est opposé à cet accord et décide de créer la République arabe sahraouie démocratique (RASD) en 1976. Une guerre armée est entamée entre le Maroc et le Front Polisario jusqu’en 1991 et la signature d’un cessez-le-feu sous l’égide de l’ONU. Entre 1976 et 1991, le Maroc a repoussé à plusieurs reprise la frontière avec les territoires contrôlés par le Front Polisario.
Depuis 1963, le Sahara occidental est un territoire non autonome selon l’ONU. L’ONU ne reconnaît pas la souveraineté du Maroc ni celle de la République arabe sahraouie démocratique. Dans les années 1980, le Maroc a construit le « mur des Sables » pour éviter les assauts sahraouis et administrer 80% du Sahara occidental.
Depuis 1991, la Mission des Nations unies pour l’organisation d’un référendum au Sahara occidental (MINURSO) est sur le terrain pour trouver une issue au conflit. Cependant, le référendum d’autodétermination promis par l’ONU est repoussé à de nombreuses reprises. En 2007, le Maroc a proposé une large autonomie pour le Sahara occidental mais le Front Polisario refuse toutes les solutions qui ne comportent pas un référendum d’autodétermination.
La RASD est reconnue par 39 États principalement d’Afrique et d’Amérique du Sud. Dans les organisations internationales, seule l’Union africaine (UA) a admis la RASD en 1992. Comme l’ONU, l’Union Européenne ne reconnaît pas la souveraineté de la RASD mais soutient la mise en place d’un référendum. À l’inverse, 47 pays soutiennent la position de Rabat dont les États-Unis. L’Allemagne, la France et l’Espagne sont favorables au plan d’autonomie proposé par le Maroc. C’est la prise de position de ce dernier pays qui a relancé le débat dans l’actualité.
En octobre 2020, des militants indépendantistes bloquent la circulation entre le Maroc et la Mauritanie. Le 13 novembre 2020, le Maroc lance une opération militaire dans la zone tampon de Guerguerat pour rouvrir la seule route qui lie les deux pays. Le lendemain, le Front Polisario annonce la fin du cessez-le-feu et déclare la guerre au Maroc. Une situation qui s’est enflammée avec la prise de position de l’Espagne.
En avril 2021, Brahim Ghali, le chef du Front Polisario et ennemi du Maroc, est soigné du Covid en Espagne. Un accueil qui a poussé les deux pays dans une crise diplomatique. Le 18 mars dernier, Pedro Sanchez, le chef du gouvernement espagnol, a rompu la traditionnelle neutralité sur la question du Sahara occidental en prenant position pour l’autonomie proposée par le Maroc.
Avec ce soutien, l’Espagne et le Maroc ont repris leurs relations bilatérales. Une décision qui a dans le même temps dégradé les relations avec l’Algérie et le Front Polisario. Abdelmadjid Tebboune, le président algérien, a qualifié « d’inacceptable moralement et historiquement » le revirement de Madrid. De son côté, le Front Polisario a rompu ses relations avec l’Espagne.
Comment la situation doit évoluer ? Quelle position la France doit-elle adopter ? On en débat aujourd’hui avec trois experts !
🕵 Le débat des experts 🕵
Le Sahara occidental, selon les Nations unies, est un territoire non autonome, soumis à un processus de décolonisation qui n’a pas été achevé où se trouve une mission des Nations Unies MINURSO, depuis 1991, dont la finalité est d’organiser un référendum d’autodétermination comme le démontre son acronyme.
Ce référendum n’a pas été organisé jusqu’à présent en raison du changement radical de la position marocaine, passant d’une opposition de certains points de procédure relatifs à l’identification des votants, à un rejet absolu du principe même du référendum qui constitue en soi la pierre angulaire du Plan de 1991.
L’indépendance via le droit à l’autodétermination, est une solution respectueuse du droit international et de la Charte de l’ONU
Le Sahara occidental doit accéder à l’indépendance, pour la simple raison qu’il n’a jamais fait partie du Maroc, comme le démontre le CIJ dans son Arrêt du 16/10/1975, et comme le stipulent toutes les décisions internationales, dont les dernières sont les décisions de CJUE de 2016, 2018 et 2021.
L’indépendance via le droit à l’autodétermination, est une solution respectueuse du droit international et de la Charte de l’ONU, sa Résolution 1514, alors que les autres solutions promues par le Maroc, comme l’autonomie sous sa souveraineté, sont contraires au droit international, vu que le Maroc dilue, à son profit, l’essence même du conflit, à savoir la souveraineté, en la décrétant sienne au préalable de toute consultation libre et authentique du peuple sahraoui.
L’indépendance respecte, par ailleurs, la Charte constitutive de l’UA, qui affirme la souveraineté des États membres, y compris la RASD, qui en est membre fondateur, alors que le Maroc n’a rejoint cette Union qu’en 2017, après une longue opposition. Le Maroc siégeant côte à côte de la RASD est, d’ailleurs, un signe de la bonne voie à suivre.
La RASD a largement avancé dans l’édification de ses institutions notamment dans les domaines de l’éducation, de la santé, de la promotion de la femme et de la pratique démocratique, et elle exerce déjà sa souveraineté sur une partie du territoire. De plus, elle est officiellement reconnue par de nombreux pays à travers le monde, avec lesquels elle entretient des relations diplomatiques.
L’indépendance est l’option sur laquelle tout le peuple sahraoui est unanime
L’indépendance est vitale pour la sécurité et la stabilité dans la région, car la « théorie du Grand Maroc » obnubile les dirigeants marocains et l’indépendance est à même de leur rendre lucidité et bon sens. Dans ce contexte, il convient de noter que les voisins immédiats de la RASD, l’Algérie et la Mauritanie, la reconnaissent et que le Maroc reste le seul pays au monde qui n’a pas de frontières définitivement délimitées avec aucun de ses voisins.
Par les temps qui courent, l’indépendance est une formidable opportunité pour aider ce monde, particulièrement les pays occidentaux, à sortir de la zone des doubles standards et rentrer dans la zone du droit. D’un côté on brandit le droit pour combattre l’occupation quand cela nous sert et de l’autre on l’escamote, comme dans le cas du Sahara occidental.
L’indépendance est l’option sur laquelle tout le peuple sahraoui est unanime. Bien que le référendum n’ait pas encore été organisé, le rejet hystérique de celui-ci par le Maroc confirme qu’il redoute l’issue. Rabat prétend que la plupart des Sahraouis se considèrent comme marocains et qu’ils jouissent de l’autorité marocaine. Pourquoi ne pas permettre l’organisation du référendum et donner aux Sahraouis l’occasion de le confirmer.
Depuis 1976, le Maroc occupe illégalement 80% du territoire de la République Arabe Sahraouie Démocratique (RASD). Aucun Etat n’a entériné véritablement cette colonisation. La RASD est même reconnue par 84 pays, ainsi que par l’Union Africaine.
Cette occupation a entraîné pendant plusieurs années de violents affrontements militaires. À la fin des années 1980 le Front Polisario, représentant reconnu du peuple sahraoui, a accepté un cessez-le-feu pour permettre l’établissement de la Mission des Nations unies pour le référendum au Sahara occidental (Minurso). Depuis, le Maroc ne cesse de refuser toute résolution politique et juridique du conflit. Le roi Mohammed VI a encore récemment déclaré que « rien n’était négociable ».
Le droit international et les résolutions de l’ONU sont pourtant sans ambiguïté : il n’existe aucun lien de souveraineté territoriale entre le Maroc et le Sahara occidental. Le peuple sahraoui a un statut séparé et distinct du Maroc. Inscrit sur la liste des territoires à décoloniser de l’ONU, il est titulaire du droit à l’autodétermination, par la voie du référendum.
Le Front Polisario n’a pas ménagé ses efforts, en acceptant de nombreuses solutions de compromis, ainsi qu’en donnant des garanties au Maroc dans le cas où le référendum aboutirait à l’indépendance. Rabat a balayé d’un revers de main ces propositions, portant l’entière responsabilité de l’échec du processus de paix.
À la suite de la brutale intervention de l’armée marocaine au poste de frontière de Guerguerat, le 13 novembre 2021, le cessez-le-feu a volé en éclats après 30 ans d’attente de l’organisation du référendum d’autodétermination, provoquant un retour à la case départ.
Les gouvernements français portent une lourde responsabilité dans cette situation. Avec l’Espagne et les Etats-Unis, la France s’oppose à l’organisation du référendum. Elle a même brandi la menace d’utiliser son droit de veto au Conseil de sécurité de l’ONU. Cela encourage l’intransigeance du Maroc, permet la répression impitoyable des Sahraouis et le pillage de leurs richesses tout en exacerbant l’instabilité régionale.
Les violations des droits humains sont une constante de l’occupation marocaine dans les territoires sahraouis occupés. Elles se sont même renforcées avec la reprise des hostilités. Cette escalade inquiétante frappe les activités des défenseurs des droits humains, leurs associations, syndicats, les militants sahraouis, ainsi que les familles de prisonniers qui subissent les violences des forces de sécurité, d’agents en civil et de groupes para-policiers, dans une atmosphère de militarisation accrue.
À l’échelle de l’UE, la France agit en meneur de tout ce qui vise à contourner les différentes décisions de la Cour européenne de justice qui a annulé, en septembre 2021, plusieurs accords de partenariat entre le Maroc et l’UE, qui accordaient des préférences tarifaires aux produits issus des territoires sahraouis occupés.
Oui, nous devons sortir du « deux poids, deux mesures » dans les relations internationales. L’application du droit international ne peut pas être à géométrie variable, en fonction des supposés « intérêts de la France ».
Oui, nous devons sortir du « deux poids, deux mesures » dans les relations internationales. L’application du droit international ne peut pas être à géométrie variable, en fonction des supposés « intérêts de la France »Oui, la France doit cesser de soutenir inconditionnellement le Maroc, pour revenir à une politique de neutralité et d’équilibre visant au respect absolu du droit international afin de trouver une issue pacifique au conflit. Il appartient au peuple sahraoui et à lui seul de déterminer son avenir.
La récente décision de l’Espagne de reconnaître le plan d’autonomie marocain pour le Sahara comme la base la plus solide au règlement du conflit marque une étape importante. Elle fait suite à la reconnaissance par les Etats-Unis, le 10 décembre 2020, de la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental.
Ancienne colonie espagnole, situé au Nord-Ouest de l’Afrique, le Sahara occidental représente un vaste espace de 266 000 km2 pour une population estimée à environ 500 000 habitants. Le Maroc exerce, depuis la Marche verte du Roi Hassan II en 1975, une autorité de fait sur la majeure partie de ce territoire, qui demeure un « territoire non autonome » au sens de la Charte des Nations Unies.
Un mur de sable sépare depuis 1980 la partie administrée par le Maroc à l’Ouest de la zone occupée par le Front Polisario, mouvement indépendantiste fondé en 1976 et soutenu par l’Algérie. Une opération de maintien de la paix des Nations Unies (la MINURSO) y est déployée depuis 1991 avec pour mandat de veiller au maintien du cessez-le-feu.
Ce sujet cristallise aussi depuis longtemps les relations entre le Maroc et l’Algérie
Le Maroc a présenté le 11 avril 2007 un plan d’autonomie pour le Sahara occidental sous souveraineté marocaine. Le Front Polisario reste, pour sa part, favorable à l’indépendance et continue de réclamer l’organisation d’un référendum d’autodétermination.
En octobre 2020, de fortes tensions sont apparues à Guerguerat, à la suite du blocage par le Front Polisario du principal point de passage économique et humain entre le Maroc et la Mauritanie. L’intervention de l’armée marocaine, le 13 novembre 2020, a permis de rétablir la libre circulation. Le Front Polisario a annoncé qu’il n’était plus tenu par le cessez-le-feu et mène depuis des opérations de harcèlements le long du mur.
Ce sujet cristallise aussi depuis longtemps les relations entre le Maroc et l’Algérie. Il a conduit à la fermeture des frontières entre les deux pays depuis 1994 et entrave toute coopération au Maghreb.
L’indépendance du Sahara occidental ne paraît pas aujourd’hui une option réaliste et viable. Une délégation du groupe d’amitié France Maroc du Sénat, que je préside, s’est rendue à Laâyoune et Dakhla en avril 2019. Nous avions pu mesurer sur place que, depuis 45 ans, le Royaume du Maroc a consenti des efforts considérables pour cette région et ses habitants en investissant dans l’éducation, la santé, le logement, les activités économiques et les infrastructures. Les populations du Sahara occidental aspirent à vivre en paix.
Le plan d’autonomie proposé par le Maroc constitue une base sérieuse et crédible
Ne sous estimons pas non plus l’importance du Sahara occidental pour le Maroc, qui occupe une place importante sur la scène internationale et en Afrique. Le Maroc joue ainsi un rôle majeur pour la stabilité au Sahel, où nos soldats sont engagés, aux côtés de nos partenaires africains, pour lutter contre le terrorisme, et il mène une diplomatie active comme en témoignent son rôle de médiateur en Libye ou la normalisation de ses relations avec Israël.
Le conflit au Sahara occidental n’a que trop duré et fait peser un risque permanent de tensions. Je considère que le temps est venu pour une relance du processus politique, en vue d’aboutir à une solution juste, durable et mutuellement agrée, sous l’égide des Nations Unies. À cet égard, le plan d’autonomie proposé par le Maroc constitue une base sérieuse et crédible.
Malgré nos recherches, nous n’avons pas pu trouver de contributeur pour défendre cette thèse. Si vous êtes compétent et légitime ou que vous connaissez quelqu’un qui l’est, n’hésitez pas à nous contacter : contact@ledrenche.fr