Le contexte
Le principe du Drenche est de présenter l’actualité sous forme de débats. Le but est qu’en lisant un argumentaire qui défend le « pour » et les arguments du camp du « contre », vous puissiez vous forger une opinion ; votre opinion.
Naturisme à Paris : ouvrons le champ des possibles
Les élu-es du groupe écologiste de Paris
Sur proposition du groupe écologiste, le Conseil de Paris a adopté un vœu permettant l’expérimentation du naturisme dans la capitale l’été prochain.
L’idée d’une zone naturiste dans l’espace public en plein Paris a fait réagir. Certains ont trouvé cela très positif, d’autres ont souri et quelques-uns ont été choqués. Il n’y a pourtant aucune raison à ce déchaînement de passions.
Retournons quelques siècles en arrière, au 17ème siècle, là où le naturisme, tel qu’on le connaît aujourd’hui, prend ses racines. L’origine de cette pratique serait née de la volonté d’améliorer sa santé grâce aux bienfaits du soleil sur le corps.
Encore aujourd’hui, la pratique du naturisme est une manière d’harmoniser sa vie avec les rythmes et les réalités de la nature. Au delà de la nudité, c’est aussi une autre relation au corps permettant à des personnes en situation de handicap, à des accidenté-es de la route,… de vivre leur corps sans regards désagréables.
La France a relancé le naturisme avec la création de la première fédération nationale en 1950. Ce sont aussi des Français-es qui ont créé la fédération internationale et qui ont défini le terme de “naturisme”.
Aujourd’hui notre pays est la 1ère destination mondiale pour sa pratique : chaque année, la France attire plus de 4 millions de pratiquant-es régulier-es dont 2 millions d’étranger-es.
Paris ne pouvait pas rester coupé de cette évolution. C’est tout le sens de cette bataille en Conseil de Paris. Et pas moins de 11 millions de Français-es se disent prêt-es à tenter l’expérience (IFOP 2015).
Malgré cette appétence, nous sommes très en retard sur nos voisins. En Finlande, la nudité et la pratique du naturisme est légale en tous lieux et en toutes circonstances. En Autriche ou en Allemagne, elle est autorisée partout sauf là où elle est explicitement interdite.
En France en revanche, la législation s’appuie sur un principe d’interdit.
Le vrai débat autour de la question du naturisme est celle des libertés. A l’heure où le législateur ne cesse d’interdir et de normer, l’ouverture d’un droit nouveau concernant l’espace public a fait réagir.
Le Paris que nous voulons doit être la ville de toutes et tous, donc reposer sur les principes fondamentaux de liberté et de gratuité.
Avec cette proposition, nous offrons aux Parisien-nes, aux habitant-es du Grand Paris et aux touristes la possibilité d’avoir un lieu où ils pourront choisir de se vêtir ou non. Libre à chacun-e de faire son choix !
Naturisme à Paris : un contresens touristique !
En autorisant la création d’une zone naturiste dans la capitale dès l’été prochain, ne répondant à cela à aucune demande initiale de la part des associations concernées, la Mairie de Paris fait preuve d’une légéreté coupable. Il ne s’agit pas, évidemment, de condamner la pratique du naturisme, mais force est de constater que Paris n’est pas extensible. Capitale la plus dense du monde, avec plus de 21.000 habitants au km2, Paris dispose d’un espace public encombré, étroit, où se côtoient déjà de nombreuses manifestations, de la Fête à Neuneu, aux marathons, vide-greniers, brocantes, Tour de France, Techno-parade, fan-zones, marchés d’art, sans oublier l’incontournable Grande Roue.
Dans une ville où chaque espace compte et doit être savamment utilisé et partagé, créer un espace dédié au naturisme relève de l’égarement ou de la provocation gratuite.
Paris a bien d’autres priorités que de se laisser aller à de telles extravagances. A commencer par redynamiser un tourisme parisien en pleine crise, premier vecteur d’attractivité économique. Paris doit reconquérir les cœurs d’une clientèle apeurée, américaine, chinoise, japonaise, italienne, russe, tout en se portant candidate à l’organisation de projets d’envergure comme les JO de 2024 ou l’Exposition Universelle de 2025. Cet enjeu de reconquête, vital pour la capitale, ne peut se satisfaire de la grave désinvolture avec laquelle la Mairie de Paris a accueilli à bras ouverts la création d’une zone naturiste.
Le tourisme est avant tout une offre commerciale, et toute offre de commerciale répond d’abord à une stratégie de communication et à ses messages. Avec l’agression de Kim Kardashian, en pleine Fashion Week, l’image de Paris auprès médias étrangers mais également sur les réseaux sociaux, ne tient plus qu’à un fil. Annoncer la création d’une zone naturiste, dans la capitale de la Mode, quel curieux message promotionnel pour le textile de luxe !
Il faut d’urgence réinstaller un peu de sérieux dans l’image de la capitale, et cesser de vouloir en faire un « Village-Vacances » géant où naturistes, véliplanchistes, adeptes du Bodypainting, du Topless, du saut à l’élastique, et autres Amish, auraient chacun leurs lieux dédiés.
Mais en réalité, il y a un autre débat dans ce débat et un arrière-train peut en cacher un autre ! Autoriser le naturisme à Paris, c’est aussi ouvrir la porte à la question de la dépénalisation de la nudité. Il s’agit cette fois d’autoriser le naturisme, non plus dans une zone réservée fermée, mais dans un espace ouvert à tous. Tout cela profite de l’absence d’encadrement législatif ou règlementaire, dans lequel naturisme et nudité se pratiquent.
La « Ville inclusive » voulue par la majorité d’Anne Hidalgo devrait d’abord inclure tous ceux qui aspirent à y vivre normalement ou à la visiter tranquilement.