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Le principe du Drenche est de présenter l’actualité sous forme de débats. Le but est qu’en lisant un argumentaire qui défend le « pour » et les arguments du camp du « contre », vous puissiez vous forger une opinion ; votre opinion.
Faire de l'avortement (ou IVG) un droit à part entière
L’avortement est un acte qui concerne une femme sur trois en France. La loi autorise toute femme qui le souhaite à avorter librement. En 1975, la loi Veil légalise l’avortement en introduisant une clause de conscience spécifique à l’IVG et la notion de « détresse », notion supprimée en 2014 par la « loi pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes ». Cela a ainsi acté la légitimité des femmes, celle de leur droit de choisir librement de poursuivre ou d’interrompre une grossesse, sans en référer à qui que soit : c’est leur choix, c’est leur droit.
Pourtant, en 2018, des femmes pensent encore qu’elles doivent se justifier et donner une raison pour avorter. Cela montre que l’avortement est encore considéré comme un acte médical « à part ».
Des blocages dans le parcours d’avortement
La loi définit la clause de conscience comme étant « le droit de refuser la réalisation d’un acte médical légal qu’un.e professionnel.le de santé estimerait contraire à ses propres convictions personnelles, professionnelles ou éthiques ». Elle est inscrite dans le code de déontologie médicale. Quand un médecin l’invoque pour une IVG ou un autre acte médical, il doit en informer sans délai la personne et l’orienter immédiatement vers un.e autre praticien.ne.
Cependant, nous rencontrons quotidiennement des femmes qui nous disent les freins voire les blocages qu’elles rencontrent de la part de professionnel.le.s de santé dans leurs parcours d’avortement : prises de rendez-vous tardives, désinformation, refus de pratiquer un avortement si elles ont déjà avorté, ou si l’avortement a lieu entre 10 et 12 semaines… Cette « double clause de conscience » spécifique à l’IVG renforce la stigmatisation de l’avortement et des femmes qui y ont recours.
Une double clause de conscience
Ce « refus de soin déguisé » ne facilite pas le parcours des femmes qui veulent mettre fin à une grossesse non voulue. La double clause de conscience devient une entrave au droit des femmes à avorter, génère des dépassements de délais légaux français, oblige certaines à avorter loin de chez elles en France ou à l’étranger.
Supprimer cette double clause de conscience est une nécessité de justice et d’égalité dans l’accès aux droits, car aucune femme ne devrait subir d’entrave à son droit, à sa légitimité : le corps des femmes leur appartient, c’est à elles seules de décider !
En la supprimant, faisons de ce droit un droit à part entière, et non un droit à part !
OUI à la liberté de conscience de chacun !
Bertrand de Rochambeau
Président du SYNGOF (syndicat national des gynécologues obstétriciens de France)http://syngof.fr/
En 2007, Simone Veil interrogée sur la clause de conscience de « sa » loi répondait : « On comprend que, pour un certain nombre de gens, il existe un cas de conscience face à cette pratique. C’est une question éthique et pas seulement un geste médical.
La seule chose que j’avais négociée avec l’Église était de ne pas contraindre les médecins. C’est un point à maintenir, car on ne peut obliger personne à aller contre ses convictions. Il est de plus en plus évident scientifiquement que, dès la conception, il s’agit d’un être vivant ».
La réalisation d’une IVG n’est pas une pratique médicale ordinaire
Cette citation éclaire en tous points les fondements de la position favorable au maintien de la clause de conscience spécifique à l’IVG. On ne peut que saluer le courage et la sagesse de Simone Veil d’avoir su mener à son terme une démarche progressiste tout en affirmant que la réalisation d’une IVG n’était pas une pratique médicale ordinaire et qu’elle en référait aux sensibilités éthiques de chacun.
En inscrivant la clause de conscience spécifique à l’IVG dans sa loi, Simone Veil a noué un pacte social avec les médecins. Elle a libéré les consciences et permis à de nombreuses femmes de recourir en toute légalité et dans les meilleures conditions possibles à cet acte médical « non ordinaire ».
Nous insistons sur ce dernier point car en réalité, ce qui est remis en cause aujourd’hui, est la qualification de ce geste médical. Le projet de loi de suppression de la clause de conscience récemment déposé par des sénateurs vise la reconnaissance de l’IVG en tant qu’acte « thérapeutique ».
Ce n’est donc plus la clause de conscience qui est en question mais bien en amont, la requalification de cet acte médical.
Rouvrir le débat serait contre-productif et dangereux
Pourtant, nul ne souhaite aujourd’hui rouvrir un débat qui serait susceptible de provoquer les résurgences de mouvements anti-IVG et serait contre-productif.
La clause de conscience ne s’oppose nullement à l’accès à l’IVG. Mais elle inscrit dans la loi le respect de la liberté de conscience de chacun et permet que l’acte soit réalisé dans les meilleures conditions pour la femme.
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