📋 Le contexte 📋
Un vote blanc est bulletin blanc ou une enveloppe vierge de toute inscription qui est placée dans l’urne pendant une élection. En France, depuis 2014, les votes blancs sont comptabilisés séparément des votes nuls par les responsables du bureau de vote, mais ils ne sont pas pris en compte dans les suffrages exprimés.
En votant blanc, l’electeur reconnait la légitimité de l’élection, il cherche à accomplir un acte citoyen et politique en se déplacant aux urnes. Le vote blanc exprime un refus à choisir un candidat pendant une élection, ou une proposition dans un réferundum. On associe généralement le vote blanc à une forme d’absentionisme civique.
Plusieurs partis politiques et associations militent pour la reconnaissance des votes blancs dans le suffrage exprimé. Une mesure qui permettrait de renforcer notre démocratie et d’assurer la représentativité de tous les électeurs. Malgré tout, la reconnaissance du vote blanc pourrait également avoir des effets négatifs : elle pourrait engendrer des difficultés juridiques importantes, laisser des sièges vacants à l’Assemblée nationale, et surtout porter préjudice à la légitimité du président de la République, qui doit être élu à la majorité absolue d’après notre Constitution.
🕵 Le débat des experts 🕵
L’expression « reconnaître le vote blanc » signifie que le vote blanc doit être intégré au calcul des résultats comme n’importe quel autre candidat. Ce n’est toujours pas le cas. La loi de 2014 indique que les bulletins blancs sont décomptés mais ne comptent pas dans le calcul des suffrages dits « exprimés ». Voter blanc équivaut ni plus ni moins à flasher l’automobiliste pour excès de vitesse sans que la moindre sanction, amende ou retrait de points ne soit infligée au chauffard.
Le vote blanc intégré au calcul des suffrages exprimés est pourtant indispensable. Outre la possibilité d’exprimer librement et pacifiquement un désaccord politique, il est la solution la plus efficace pour lutter contre l’abstention et le vote sanction qui ruinent la crédibilité des élus. Son rôle consiste à agir comme un filtre démocratique, à cristalliser la contestation électorale sur un outil plutôt que sur un candidat et restaurer l’acte de vote dans toute sa dimension, à savoir un acte d’adhésion à un candidat ou un programme. La contrepartie est la l’invalidation du scrutin en cas de votes blancs majoritaires. Cette sanction est essentielle. Elle marquerait un véritable rejet lucide et éclairé d’une offre politique jugée défectueuse par les électeurs.
Le seul argument qui s’oppose à sa reconnaissance tient précisément dans ce risque d’invalidation au second tour. En intégrant le vote blanc au calcul des résultats, celui-ci provoquerait les conditions d’un duel à trois : le candidat A, le candidat B et le vote blanc. Le seuil de 50% synonyme de majorité absolue serait alors plus difficile à atteindre. Mais cet obstacle pourrait aisément être levé. Il suffirait pour cela de modifier la Constitution et d’abaisser le seuil à 33%. On parlerait alors de majorité relative. Le candidat qui obtiendrait le meilleur score serait élu. Si le vote blanc arrivait en tête du second tour, l’élection serait annulée et un nouveau scrutin serait organisé avec de nouveaux candidats.
Dans l’attente d’une modification de la Constitution en vue d’intégrer la question du vote blanc dans le processus électoral, rien n’empêche, en l’état de nos institutions, que le vote blanc soit reconnu et intégré au calcul des résultat du premier tour. Il ne fait aucun doute que la physionomie du second tour s’en trouverait alors radicalement modifiée.
La question de la reconnaissance du vote blanc apparaît aujourd’hui totalement décalée au regard de la crise grave que traverse notre pays. C’est un projet anecdotique, de peu d’intérêt, dans une France où la violence de la rue se substitue au fonctionnement normal de nos institutions. Il n’apporte aucune réponse concrète à la crise de notre démocratie représentative.Il semble souhaité par une partie des électeurs mais on a beaucoup de peine à identifier le but recherché et son intérêt réel.
En fait, il convient de se poser la question essentielle du vote. Voter c’est faire un choix. Voter blanc c’est dire qu’aucun candidat ne me convient, c’est l’affirmer en ne prenant pas parti. Comptabiliser les votes blancs permet de déclencher des commentaires, des analyses politiques, mais on sort de l’objectif du scrutin : Choisir un candidat pour lui confier le pouvoir exécutif. Un tel dispositif est-il vraiment utile ? De plus, la reconnaissance du vote blanc présente un véritable risque puisqu’il affaiblit la légitimité de l’élu. Cette légitimité se calcule en pourcentage des suffrages exprimés. Heureusement !
En les prenant en compte dans la base de calcul, le score du candidat élu est mécaniquement diminué. Dans la période que nous traversons et dans celle que nous allons connaître, les élus auront besoin d’affirmer une autorité, qui hélas, leur est de plus en plus contestée. Au sortir d’une élection, l’élu doit avoir les moyens d’exercer son mandat.
Réduire en pourcentage le résultat du vainqueur aboutit à l’affaiblissement de l’élu. Il leur est reproché de ne pas peser sur les choses, de ne pas pouvoir changer ce qui doit être changé. Leur affaiblissement ne peut aboutir qu’à un résultat contre-productif.
Les démocraties les plus performantes sont celles dans lesquelles les institutions solidifient les mandats électifs. Cette proposition doit rester dans les cartons à une période où l’action doit prendre le pas sur le commentaire. La reconnaissance du vote blanc n’est pas une bonne chose pour notre démocratie.