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Agir sur le cumul des mandats: un impératif démocratique !
Pierre Mathiot
Membre fondateur du collectif ReGénération Professeur des universités en science politique à Sciences Po LilleMa réponse est un oui de raison et de nécessité démocratiques. Nous avons bien conscience en faisant cette proposition de toucher à l’un des points sensibles du personnel politique professionnel et nous savons que certains ne manqueront pas de nous opposer des arguments dont on sait bien, au fond, qu’ils visent d’abord et surtout à protéger ceux qui font de la politique un métier, des mandats une sorte de rente et qui, au total, ne savent pas faire autre chose que de faire de la politique.
Notre première motivation est de rappeler que la démocratie représentative trouve ses fondements dans la délégation de son pouvoir par le peuple souverain à des représentants élus en son sein et qui agissent en son nom.
Ceux qui gouvernent en démocratie doivent être des représentants du peuple et pas des substituts au peuple.
Ce principe démocratique fondamental suppose, pour être bien respecté, que ces représentants s’investissent pleinement dans l’exercice de leur mandat dans tous ses aspects et, aussi, qu’ils le fassent de façon ponctuelle, limitée dans le temps.
Le but, au fond, est qu’ils agissent de la façon la plus professionnelle possible tout en ne devenant pas des professionnels de la politique. La politique n’est pas un métier mais une période de sa vie qu’une femme ou un homme va proposer aux citoyens de consacrer à la gestion du bien commun avant de s’en retourner à d’autres activités.
Le fait pour un(e) élu(e) de ne détenir qu’un seul mandat —et d’avoir les moyens financiers et matériels permettant de l’exercer dans de bonnes conditions— lui permet de s’y consacrer pleinement, de connaître au mieux les dossiers pour décider en connaissance de cause, d’être en mesure de contrôler le travail des administrations et des conseillers, d’avoir du temps pour consulter le peuple et lui faire retour sur ses actions….
Cela autorise aussi, de façon variable selon les mandats, à travailler à côté pour ne pas perdre le contact avec certaines réalités, et créé les conditions pour que le nombre total des élus soit plus important.
Enfin, le non cumul doit aussi avoir une dimension temporelle, c’est-à-dire ne pas dépasser une durée maximale au-delà de laquelle un élu cesse d’être un représentant pour devenir une sorte de propriétaire de mandat(s) en en faisant des éléments de son patrimoine politique. D’où une proposition complémentaire de Re-Génération: qu’un mandat ne puisse pas être exercé plus de deux fois de suite.
La question sur le cumul simultané est plus facile à régler que celle du cumul dans le temps
La question sur le cumul simultanée est plus facile à régler que celle du cumul dans le temps.
Il n’est pas possible de traiter ici de toutes les situations de cumul alors je me limiterai à celle qui concerne les parlementaires. Car à partir de 2017 (par la loi du 14 février 2014), un parlementaire ne pourra plus être Président ou maire d’un exécutif et c’est le moins. Cette interdiction est insuffisante car il ne parait pas possible non plus d’assurer un mandat de parlementaire et un mandat de Vice-Président d’un Conseil régional, d’un Conseil départemental ou encore d’une mairie qui occupe au moins un mi-temps si on veut assurer la réalité de ces fonctions.
En revanche, il est tout à fait possible et même souhaitable de rester conseiller municipal de sa commune et/ou conseiller communautaire. Même s’il n’est pas indispensable d’occuper ces mandats locaux pour appréhender les problématiques locales, un mandat de base local met l’élu national en prise directe avec la réalité locale qui à la fois doit nourrir l’action du législateur et permet aussi de mieux en mesurer les effets.
La question du cumul dans le temps et en revanche beaucoup plus difficile à régler. De quoi parle-t-on d’ailleurs ? Une personne qui aurait assuré trois ou quatre mandats de maire puis deux mandats de conseiller régional puis en encore un de conseiller départemental, soit 36 ans de mandat et qui serait à la fin de son premier mandat de parlementaire serait-il en situation de cumul dans le temps ? Le serait-il moins qu’un parlementaire qui achèverait son second ou son troisième mandat de parlementaire après un mandat de conseiller municipal ?
Mais sans doute veut-on ici ne traiter que la question de renouvellement et donc du cumul dans le temps des seuls mandats de parlementaires. La question de l’âge intervient aussi. Celle du cumul avec une activité professionnelle (combien d’heures par semaine ?) ou encore des différents revenus.
Il apparaît que la motivation baisse avec le temps, avec l’âge aussi. Que le fait de ne pas disposer d’assez de temps, du fait du cumul de mandat peut constituer un empêchement au travail et ceci dès le premier mandat. Il n’est pas non plus scandaleux de dire que l’expérience, là comme ailleurs, a son importance et que l’efficacité peut être supérieure au second mandat par rapport au premier…
En conclusion provisoire sur ce point du cumul dans le temps, on ne peut que constater certaines situations où l’on s’étonne que certaines personnes occupent encore ce poste mais il faudra être inventif pour trouver la bonne formule de non cumul dans le temps…