[Histoire] Faut-il autoriser le droit de vote des femmes ?

Une manifestation en faveur du vote des femmes dans les années 1920
Une manifestation en faveur du vote des femmes dans les années 1920

Numéro 1

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Le 29 avril 1945, les femmes votaient pour la première fois en France...
… et c’est en mémoire de cet événement que nous faisons revivre dans LE DRENCHE un débat qui a occupé la France pendant 150 ans : « Pour ou contre le droit de vote des femmes ? ».

Fort heureusement, certaines questions ne font plus débat aujourd’hui en France. Le droit de vote des femmes en fait partie. Néanmoins, 1945 n’est pas si loin, et il nous semble important de se souvenir que certains droits n’ont pas toujours été une évidence, et ont nécessité de nombreux débats et combats pour être acquis. Nous y voyons aussi la preuve que des argumentaires bien construits peuvent changer la face du monde.

Aujourd’hui, même si les femmes ont le droit de voter et d’être élues, elles sont encore victimes de nombreuses discriminations, inégalités, etc. La cause de l’égalité entre femmes et homme est un combat qui n’est pas terminé. Nous espérons que dans quelques années, certains débats paraîtront aussi obsolètes que celui-ci.

Quelle a été la chronologie du droit de vote des femmes en France ?
Dès la Révolution française, l’idée du droit de vote pour les femmes est défendu par des personnalités comme Condorcet ou Olympes de Gouges, qui publie la déclaration des droits de la femme. Mais cette proposition trouve un écho faible dans la société.

En 1848 apparaît le suffrage « universel » masculin. Quelques féministes réclament le droit de vote pour les femmes, mais là encore, elles sont marginalisées.

L’idée se développe petit à petit en France au cours du XIXe siècle. En 1893, la Nouvelle-Zélande accorde le droit de vote aux femmes.

La première guerre mondiale fait sortir les femmes des foyers et évoluer les mentalités. Dans la période d’entre-deux guerres, la Chambre des députés vote 6 fois en faveur du droit de vote des femmes ; mais le Sénat bloque le texte à chaque fois.

Il faudra attendre 1945 et la libération pour que les femmes aient effectivement le droit de vote, sous l’impulsion notamment du Général de Gaulle. Le 29 avril 1945, il y a 71 ans, les Françaises votaient pour la première fois aux élections municipales.

Comment avons-nous organisé le débat ?

Comme nous le faisons habituellement, nous avons donné la parole à des personnes légitimes (à l’époque) et engagées dans leur domaine.

Nous avons choisi des textes qui ont réellement été écrits ou prononcés par les contributeurs présentés ici. Nous avons également choisi des textes de la période d’entre-deux guerres, soit à l’époque où le débat faisait le plus polémique.

Numéro 2

Se positionner

Le principe du Drenche est de présenter l’actualité sous forme de débats. Le but est qu’en lisant un argumentaire qui défend le « pour » et les arguments du camp du « contre », vous puissiez vous forger une opinion ; votre opinion.

LE « POUR »

Exigez le droit de vote !

Billet rédigé par :

Louise Weiss (1893 - 1983)

Journaliste, féministe, et Députée européenne de 1979 à 1983

Les Américaines votent, les Anglaises votent, les Allemandes votent, les Autrichiennes, les Tchécoslovaques, les Hongroises, les Chinoises votent. Les Françaises ne votent pas.

Femmes, dès que vous vous mariez, la loi vous déclare incapables.

En effet : vous devenez incapables de vous diriger librement, de voyager, d’exercer une profession ou un métier sans autorisation maritale : c’est l’incapacité quant à votre personne.

Sans cette autorisation il vous est impossible de gérer vos biens, d’acheter, de vendre, d’ester en justice pour défendre vos intérêts alors que vous pouvez être ruinées par un conjoint indigne qui vendra vos meubles ou gaspillera vos économies sans que vous ayez quoi que ce soit à dire : c’est l’incapacité quant à vos biens.

Seules, vous ne pouvez prendre aucune décision pour les problèmes qui vous tiennent le plus à cœur, à savoir : l’éducation, la santé, l’avenir de vos enfants : c’est votre incapacité en matière de puissance paternelle.

Par contre vous n’avez besoin d’aucune autorisation pour être poursuivie par un tribunal répressif. Mineures pour vos biens, vous êtes majeures pour vos fautes. Exigez la réforme du Code Civil.

Ce n’est pas tout, vous payez des impôts. Or, vous n’êtes pas consultées sur l’emploi des fonds que vous versez ainsi au budget.

Pourtant de ce budget dépendent les problèmes qui intéressent voire sort et celui de vos enfants, les traitements, les pensions, l’instruction publique et toutes les mesures relatives à la défense nationale, la paix ou la guerre.

Votre argent est utile à la France. Votre opinion ne l’est-elle donc pas ?

Exigez le droit de vote.

LE « CONTRE »

La mère de famille se contente du rôle qui lui est imparti par la nature

Billet rédigé par :

Edmond Lefebvre du Prey (1866 - 1955)

Député de 1909 à 1927, Ministre de l'Agriculture (1921-1922), de la Justice (1924), et des Affaires étrangères (juin 1924).

La conséquence du projet, c’est que la femme qui est en plus grand nombre que l’homme (de nombreux hommes étaient morts à la guerre, NDLR) deviendra la directrice incontestée des affaires publiques. Mais, parce qu’elle a fait son devoir pendant la guerre, est-ce une raison pour lui donner cette direction ? Mais, l’homme ?

Certes, dès qu’il rentrait chez lui, il y trouvait des consolations à ses fatigues et à ses risques. Mais lui, luttait contre la mort. Je me rappelle qu’au début de la mobilisation, j’accompagnais à la gare, comme maire, le 8e régiment d’infanterie. Un petit sergent me disait : «Non pas au revoir, mais adieu. Qu’importe, c’est pour la France.» Voilà ce que faisaient les hommes à cette heure-là. Rentrés chez eux, est-ce que la direction des affaires publiques va leur échapper ? L’homme a fait son devoir : est-ce le cas de le dépouiller de son droit de diriger ?

Le projet actuel est grave dans ses conséquences vis-à-vis de la famille, car l’introduction des querelles et des discussions politiques dans le foyer va être une cause de dissociation du ménage. Croyez-vous que vous allez augmenter l’union par votre projet ?

Accordez-lui l’égalité civile avant de lui donner l’égalité politique. Est-ce que vous allez lui donner la capacité civile ?

Quand vous aurez accordé à la femme des droits politiques, aurez-vous satisfait à toutes ses aspirations, et au lieu d’introduire dans les luttes électorales le calme et la courtoisie – quelle illusion ! – vous aurez introduit dans la famille les querelles, les dissensions et le désordre, vous aurez détruit l’unité familiale.

Tant pis pour les enfants. Adieu, la douceur du foyer !

La mère de famille, vraiment Française, se contente du rôle qui lui est imparti par la nature ; épouse dévouée, mère toujours prête au sacrifice, elle veut s’en tenir là.

 

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