Le vote blanc doit-il avoir un pouvoir révocateur ?

Le contexte

Qu'est-ce que le vote blanc ?
Dans le cadre d’une élection ou d’un référendum, le vote blanc consiste à ne voter pour aucun des candidats ou aucune des propositions. En France, cela consiste à déposer dans l’urne une enveloppe vide.

Il symbolise une volonté de participer au débat démocratique en marquant un refus des choix proposés.

Il est à différencier du vote nul qui est un vote non valable. En général, ce dernier fait suite à une erreur de manipulation :

  • Bulletins de vote déchirés, raturés, annotés ou griffonnés
  • Autre contenu qu’un bulletin officiel
  • Enveloppe contenant plusieurs bulletins
Qu'en est-il en France ?
Jusqu’en 2014, le vote blanc était assimilé au vote nul. La loi no2014-172 du 21 février 2014 a modifié le code électoral ; depuis, les bulletins blancs sont décomptés séparément. Toutefois ils n’entrent pas en compte pour la détermination des suffrages exprimés et n’ont donc pas de pouvoir révocateur (voir définition ci-dessous).

Cette disposition a été appliquée pour la première fois lors des élections européennes du mois de mai 2014. Lors des 3 dernières élections (Européennes, Départementales et Régionales), le pourcentage de vote blanc se situait entre 2,41% et 5,72% des votes.

Qu'est ce que le pouvoir révocateur ?
Lorsque le vote blanc est comptabilisé dans les votes exprimés, l’élection peut être annulée si le pourcentage de vote blanc dépasse une certaine limite. On dit alors qu’il a un pouvoir révocateur.

Le vote blanc a-t-il un pouvoir important ailleurs ?
Comme en France, le vote blanc est parfois comptabilisé mais il est rarement pris en compte dans les suffrages exprimés. Il existe néanmoins quelques exceptions notables :

  • En Colombie, le vote blanc est compté comme un vote normal. Si les votes blancs obtiennent la majorité absolue dans le cadre d’une élection majoritaire, il faut alors revoter. De plus, les candidats qui se sont présentés ne peuvent se représenter.
  • Au Pérou, les votes blancs sont bien comptés séparément des votes nuls mais les candidats sont élus à la majorité des votes validés. Si les votes blancs et nuls sont trop nombreux (supérieur à deux tiers) l’élection est déclarée nulle. Il permet donc d’invalider les élections. En revanche, le vote est obligatoire !

Le principe du DRENCHE est de présenter l’actualité sous forme de débats. Le but est qu’en lisant un argumentaire qui défend le « pour » et les arguments du camp du « contre », vous puissiez vous forger une opinion ; votre opinion.

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Le garde-fou démocratique

Le Pour gris

Billet rédigé par :


Logo citoyens du vote blancXavier De Jaeger 

Citoyens du Vote Blanc

www.parti-du-vote-blanc.fr

Pour commencer, il convient de rappeler ce qu’exprime le vote blanc. Ce n’est ni un désintérêt, ni un manque d’information ; le vote blanc clame avant tout le refus des candidats en présence, des programmes présentés et affirment l’hostilité de l’électeur « blanc » face à la politique qu’on lui propose.

Dans notre conception, le vote blanc porte un message unifié : “Je souhaite m’exprimer mais ce que vous me proposez ne me convient pas”. De ce fait, les votes blancs majoritaires dans les suffrages exprimés peuvent invalider un scrutin, en l’absence d’adhésion notable des votants aux programmes proposés.

Le vote blanc doit avoir un pouvoir révocateur afin de jouer son rôle de garde-fou démocratique. Il est le garant d’une expression réelle des citoyens et de leur volonté grandissante de rejouer le scrutin si les candidats n’obtiennent pas la majorité. Il est primordial que le vote blanc ait un pouvoir révocateur pour éviter que des candidats ne soient élus alors que 99,9% des électeurs ont exprimé leur refus envers ces derniers en votant blanc. Car c’est malheureusement vers cette aberration que notre système se dirige si le vote blanc avec pouvoir révocateur n’est pas rapidement pris en compte.

Afin d’éviter des scrutins à répétition, il faut que le pouvoir révocateur du vote blanc soit aussi associé à l’interdiction à ceux qui se sont présentés de participer à la nouvelle élection. Le pouvoir révocateur du vote blanc, associé à cette interdiction, aura pour conséquence de faire émerger de nouveaux candidats avec de nouvelles propositions, permettant ainsi de dynamiser la démocratie. A l’instar, de ce qui est proposé en Colombie, il est aussi possible de limiter le nombre de fois où le vote blanc peut annuler une même élection. Ceci permettra de couper court aux critiques de certains représentants qui préfèrent agiter l’épouvantail du blocage qu’occasionnerait le pouvoir révocateur du vote blanc plutôt que de voir l’avancée démocratique qu’il représente.

La possibilité de dire « non » doit être une alternative possible. Ceci est à inscrire dans le marbre de la Constitution. Sans son caractère révocateur, le vote blanc perd son intérêt démocratique et sa portée contestataire mais combien légitime.

Voter, c’est choisir !

Le contre gris

Billet rédigé par :

Arnaud LacheretArnaud Lacheret 

Docteur en Science Politique, Enseignant-chercheur à Idrac Business School, chercheur associé à Pacte / Sciences Po Grenoble

Comme après chaque élection intermédiaire, on souligne une abstention importante et comme à chaque fois qu’une abstention est importante, on se dit que le vote blanc pourrait avoir plus de pouvoir. De brillants esprits proposent alors de le comptabiliser réellement en dehors des nuls. On va même jusqu’à proposer qu’il compte dans les exprimés. Parfois, on propose qu’au-delà d’un certain pourcentage de vote blanc, le scrutin soit annulé.

A priori, cette idée parait séduisante, hautement démocratique. Elle permettrait, comme en Espagne, par exemple, de mieux identifier le vote de ceux qui choisissent de ne pas choisir, qui ne se reconnaissent pas dans l’offre politique proposée.

En fait, rien n’est plus pervers que cette idée, qui n’a fait ses preuves nulle part : l’Espagne n’a pas eu besoin du vote blanc pour voir avec Podemos et Ciudadanos une nouvelle offre politique émerger. Dans les pays où le vote est obligatoire comme la Belgique, ou dans ceux où le référendum est pratiqué très souvent comme la Suisse, peut-on parler de modèle démocratique idéal ? La Belgique est de fait coupée en deux, la Suisse vote majoritairement pour un parti d’extrême droite, est-ce politiquement plus enviable que ce que l’on voit en France ?

La notion de vote, dans notre République, est indissociable de celle de choix. On vote pour un représentant qui nous convient, et quand cela ne suffit pas pour quelqu’un qui nous parait le moins éloigné de nos aspirations. Ne pas choisir, quelque part, c’est refuser l’offre existante et philosophiquement, cela ne correspond pas à l’idéal républicain. On soulignera que dans un pays comme le nôtre où existent des dizaines de partis politiques, peut-on vraiment sincèrement affirmer qu’aucun ne convienne ?

Par ailleurs, une plus grande importance donnée au vote blanc pourrait-il vraiment lutter contre l’abstention ? Celle-ci est la plus importante dans les banlieues populaires : 20% des inscrits votent à Vaulx en Velin, record national. Est-on bien certain qu’en donnant davantage de pouvoir au vote blanc, cette population très pauvre, composée notamment de nombreux jeunes issus de l’immigration, se mettrait comme par magie à se rendre aux urnes ?

Faire revenir les électeurs aux urnes nécessite principalement qu’enfin, les partis traditionnels apprennent à parler au peuple, celui de la France périphérique et des banlieues qui a parfois le sentiment d’être dépossédé  de ses valeurs, de ses repères, celui qui ne se reconnait plus dans cette République qui ne s’adresse qu’à une élite lointaine et qui ignore son quotidien. Ce n’est pas parce qu’on leur donnera le pouvoir de révoquer qui que ce soit en votant blanc que cet électorat cessera de voter pour les extrêmes ou de s’abstenir.

 

 

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Photo : Marcello Casal Jr/ABr – Wikimédia Commons

 

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