📋 Le contexte 📋
En 2018, une enquête d’opinion réalisée par OpinionWay pour 20 minutes auprès de 1 179 jeunes majeurs âgés de 18 à 30 ans a révélé que 62 % avaient visionné leurs premières scènes pornographiques avant 15 ans (dont 11 % avant 11 ans)
Source : Le Monde
Le contrôle parental est un système permettant aux parents de sécuriser automatiquement l’accès des enfants à un média, Internet.
Installé sur un ordinateur et/ou un téléphone portable, le logiciel de contrôle parental filtre et limite certains contenus afin de protéger l’enfant contre des contenus inappropriés et parfois choquants pour son âge lorsqu’il navigue sur la toile (pornographie et violence notamment).
Si le contrôle parental est mis en place selon la volonté des parents, sa version « par défaut » qualifie une protection préalablement installé dans l’appareil, de manière automatique.
En 2017, le projet de « contrôle parental » activé par défaut pour l’ensemble des opérateurs avait été évoqué par Laurence Rossignol, l’ancienne ministre des Familles, de l’Enfance et des Droits des femmes.
Mais le 20 novembre dernier, pour la journée internationale des droits de l’enfant, Emmanuel Macron a annoncé un durcissement des sanctions pour la production et l’utilisation d’images pédopornographiques (5 ans de prison, fichage systématique des auteurs et interdiction pour ces derniers de travailler auprès d’enfants)
Pour lutter contre l’exposition des enfants à la pornographie sur Internet, le président a annoncé qu’il donnait six mois aux opérateurs pour mettre en place un contrôle parental par défaut et généraliser des « dispositifs de vérificateurs d’âge ».
Source : Le Figaro
🕵 Le débat des experts 🕵
L’exposition des mineurs aux images pornographiques est un fléau et se fait souvent éloignée du regard des adultes. Nos jeunes en regardent de plus en plus et de plus en plus tôt. Certains adolescents s’abreuvent de ces images qu’ils considèrent comme un mode d’emploi de leur sexualité à venir.
Rien ne remplacera l’éducation à la vie affective et sexuelle transmise par les adultes pour aider les mineurs à accéder à une sexualité épanouie et respectueuse d’eux-mêmes et de leur partenaire. Mais les parents ne sont pas à l’aise pour aborder le sujet et les adultes sont frileux de parler de pornographie.
Le contrôle parental par défaut n’est pas LA solution mais c’est un filtre utile et efficace.
Le contrôle parental par défaut n’est pas LA solution mais c’est un filtre utile et efficace. Seule solution technique fiable, sa généralisation permet, en équipant toutes les familles, de pallier aux différences d’accompagnement parental.
Le contrôle parental permet de rassurer les parents qui ne peuvent pas systématiquement surveiller leurs enfants quand ils sont sur internet. Cette installation par défaut de protection anti-porno pour nos enfants deviendra la norme, comme l’anti-virus pour nos ordinateurs.
Abandon des pouvoirs publics et négligence des parents
Le contrôle parental a pâti depuis les années 2000 d’un abandon des pouvoirs publics qui a ralenti son développement alors que sa fiabilité n’a jamais été mise en cause. Aujourd’hui, une minorité de parents installe ces systèmes de contrôle. Jugés complexes à installer et soi-disant faciles à contourner, ces arguments ont décourager la généralisation de ces équipements. Les parents espèrent que leurs propres enfants ne soient pas spectateurs de pornographie mais la curiosité ou la pression du groupe les pousse à en visionner ou à la rechercher.
Le contrôle parental est un garde-fou qui protège les enfants à un âge où ils ne sont pas capables d’évaluer le danger.
Le contrôle parental est un garde-fou qui les protégera d’eux-mêmes à un âge où ils ne sont pas capables d’évaluer le danger. Ni nécessairement demandeurs, si l’on en croit des chiffres qui mentionnent que beaucoup d’entre eux considèrent y avoir été exposés trop jeunes.
L’accès à la pornographie est trop facile sur Internet. Le complexifier sera toujours plus protecteur, pour les plus jeunes et les moins acharnés, que l’inertie actuelle. Que vaut l’effort de désinstaller un contrôle parental pour un outil utilisé par un majeur au regard des dégâts causés par l’exposition des mineurs à ces images ?
Le contrôle parental par défaut est une mesure d’envergure qui montre que tous les adultes de la société, et non seulement les parents, se saisissent enfin ensemble du sujet, après l’avoir trop longtemps négligé au profit de leurs intérêts économiques et de leur confort. Une preuve de maturité de l’ère numérique qui ne considère plus que respecter les droits des enfants dans l’univers numérique est un frein à son développement.
L’association DésintoX se réjouit évidemment de ce que les pouvoirs publics fassent enfin mine de se saisir de la question de la pornographie de masse en ligne, et elle salue naturellement toute initiative dans le sens d’une jugulation de celle-ci.
Une mauvaise mesure : soit le contrôle est parental soit il est automatique
Il lui apparaît néanmoins que cet encadrement par un contrôle parental automatique constitue non seulement une demi-mesure, mais aussi en un certain sens une mauvaise mesure. On ne s’en étonnera qu’à moitié venant de celui qui affirmait en 2017 à Konbini au sujet de la pornographie : “Ça fait partie de la vie !”…Difficile à présent pour lui de rester crédible sur le sujet.
Une mauvaise mesure tout d’abord, sur la forme que le Président entend lui faire emprunter : un “contrôle parental automatique”. Non. Soit le contrôle est parental et relève donc de la volonté des parents et de leurs choix éducatifs ; soit il est automatique et c’est une mesure d’ordre public impérative décidée par l’Etat. Dans ce dernier cas il s’agit d’un contrôle légal. Ce détail sémantique revêt une importance primordiale puisqu’ici le chef de l’État donne l’impression de vouloir s’ingérer dans la vie des familles en se substituant à l’autorité parentale.
C’est la meilleure façon de susciter l’opposition contre une mesure qui irait plutôt dans le bons sens si elle n’était pas si mal formulée.
Appliquer la loi existante
Sur le fond ensuite, il s’agit d’une demi-mesure, qui, si elle va dans le bon sens, n’est absolument pas à la hauteur des enjeux dont il est question.
L’article 227-24 du code pénal sanctionne de trois ans de prison et 75 000 euros d’amende toute diffusion de pornographie dès lors qu’elle est susceptible d’être vue par des mineurs. Avant d’inventer de nouveau dispositifs, ne faudrait-il pas déjà appliquer la loi existante ? On n’imagine pas un buraliste vendre un magazine porno à un enfant de 8 ans. Comment se fait-il que la loi ne soit jamais mise en force s’agissant des sites Internet ? Que font les Procureurs qui sont censés introduire les actions nécessaires au respect des dispositions du code pénal ? C’est auprès d’eux que le Président de la République devrait agir en tout premier lieu.
La seule mesure pertinente à prendre en l’état actuel des choses serait une interdiction de principe de l’ensemble des sites pornographique – à faire respecter par les FAI – sauf sur autorisation du Ministère de l’Intérieur moyennant la justification d’un système efficace de vérification de l’âge par les sites sollicitant leur agrément en France. Ce système a déjà fait la preuve de sa faisabilité et de son efficacité en matière de paris sportifs en ligne.