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Faut-il reporter les élections régionales 2021 ?

📋  Le contexte  📋

Les élections régionales ont traditionnellement lieu au mois de mars, tous les six ans. Elles permettent d’élire les conseils régionaux, assemblées décisionnelles de l’échelon régional. 

Elles ont lieu au suffrage universel, au cours d’un scrutin proportionnel de liste à deux tours, avec prime majoritaire. 

Concrètement, ça veut dire qu’en tant qu’électeur on vote pour une liste (et non pour un candidat, comme aux présidentielles). Cette liste doit alterner candidats hommes et femmes – par ailleurs, on ne peut pas choisir qui on veut dans cette liste, ce qu’on appelle le panachage est donc interdit. La répartition des sièges se fait de manière proportionnelle aux résultats du vote, comme expliqué ici.

Déjà repoussées au mois de juin 2021 à cause de la pandémie et du risque sanitaire, les élections régionales soulèvent l’épineuse question de la démocratie en tant de COVID-19. L’éventualité d’un deuxième report à la rentrée 2021 fait débat. 

D’un côté, les défenseurs d’un maintien des élections s’appuient sur les exemples d’élections ayant eu lieu ailleurs en Europe, malgré la pandémie, comme au Portugal début 2021. De l’autre, ceux qui revendiquent le droit de faire campagne dans de meilleures conditions que celles que nous connaissons aujourd’hui, en plein troisième confinement. Et au milieu de tout cela, un gouvernement qui essuie de nombreuses critiques face à la gestion de la pandémie.

Le Premier ministre Jean Castex a annoncé cette semaine un décalage des élections régionales, initialement prévues les 13 et  20 juin, au 20 aet 27 juin. Il a défendu cette initiative en soutenant que cela permettrait aux candidats de faire campagne une semaine de plus, ainsi que de vacciner environ deux millions de personnes supplémentaires d’ici là.

 Cette proposition a été soutenue par l’Assemblée nationale mardi 13 avril.

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Le « Pour »
Bruno Fuchs
Député MoDem du Haut-Rhin
Reporter les élections de juin pour moins courir de risques sanitaires et démocratiques

Depuis un an les Français ont tous reporté un moment important de leur vie : ils ont dû décaler la date de leur mariage, repousser leurs vacances, leurs voyages. La vie politique française doit également s’adapter aux contraintes exceptionnelles que les Français se sont tant employés à respecter.

Maintenir les élections régionales et départementales au mois de juin revient à faire courir un risque sanitaire certain. Dans leur majorité, les maires des communes se disent incapables d’assurer une organisation fiable et garantissant la sécurité de tous. Dans les grandes villes, ils expriment leur incapacité à mettre toutes leurs forces dans la lutte contre la pandémie et en même assurer l’organisation de deux scrutins les mêmes jours. Devrait-on alors privilégier la vaccination des assesseurs au détriment de celle des professeurs ou des agents de police ?

En revanche, il est probable qu’à l’automne l’épidémie ait perdu de l’ampleur, lorsque la population sera plus massivement vaccinée avec deux doses. Il sera alors devenu moins risqué d’organiser des régionales et départementales.

Paradoxalement, avoir des élections en juin c’est aussi un recul des pratiques démocratiques. Dans cette hypothèse, l’abstention risque d’être très forte, les élections municipales de 2020 ayant démontré la corrélation entre la crainte épidémique et l’abstention. Être « mal élu » affaiblit la légitimité des élus.

Il sera aussi impossible de faire réellement campagne : pas, ou peu, de rencontres ; pas, ou peu, de débat publics. Une campagne dématérialisée, et donc atrophiée, aura comme conséquence directe de favoriser mécaniquement les sortants. Cette « non-campagne » c’est aussi le risque de renforcer la défiance entre citoyens et politiques que l’on pourrait alors aisément accuser de favoriser leur réélection plutôt que de faire face à l’épidémie avec les Français. 

Enfin, il faut se souvenir que le dernier scrutin régional a eu lieu en décembre 2015. Il n’y aurait par conséquent pas de drame à ce que le scrutin ait lieu en octobre 2021. 

Le vrai risque sanitaire et démocratique, n’est pas le report mais bien le maintien du scrutin au mois de juin. Je propose par ailleurs que ce délai supplémentaire serve à moderniser le mode de scrutin et à aborder la question du vote par correspondance que nous n’avons pas eu l’ambition de réintroduire. C’est ce conservatisme dans les pratiques démocratiques qui nous place aujourd’hui devant nos responsabilités.

Le « Contre »
Philippe Laurent
Maire de Sceaux et secrétaire général de l’Association des maires de France
Il ne faut pas reporter les élections régionales

Comme l’a exprimé clairement l’Association des maires de France, je suis favorable au maintien des élections régionales et départementales en juin prochain. Le gouvernement vient d’ailleurs de les confirmer, après avoir constaté qu’une large majorité de maires le souhaitaient également. 

Le fond de l’affaire, qui nous a mobilisés pendant trois jours, c’est que le gouvernement a très mal posé le sujet. Ainsi, il a suggéré de manière explicite que les maires pourraient être tenus pour responsables des éventuelles difficultés sanitaires qui viendraient à survenir à l’occasion de ces scrutins. La question posée aux maires était donc très anxiogène. La question aurait mieux été comprise et plus légitime si elle avait été : « Quelles sont vos attentes et propositions en terme d’organisation pour que les scrutins prévus en juin se déroulent dans les meilleures conditions ? ». Malgré cela, les maires ont démontré de nouveau leur attachement à la démocratie. 

Le Conseil scientifique, les groupes parlementaires, les partis politiques, les associations d’élus, dans la très grande majorité, ne se sont pas opposés au maintien du calendrier électoral, et la plupart des pays démocratiques ont procédé ou vont procéder à leurs scrutins. Alors pourquoi notre gouvernement a-t-il ainsi tardé à prendre ses responsabilités ? Certes les conditions sont inédites, mais les maires sont légitimistes, ils savent organiser les élections et ils appliqueront strictement les consignes du gouvernement.

Une décision de nouveau report aurait créé un grave précédent et serait porteuse de dérives dangereuses. Le calendrier électoral ne peut servir de variable d’ajustement ni à la crise sanitaire, ni à tel ou tel mouvement politique. 

Qui peut être certain, d’ailleurs, que la crise sanitaire sera terminée à l’automne ou au printemps prochain ? L’apparition de nouveaux variants, qui rendraient les vaccins actuels inopérants, est toujours possible. Dans ces conditions, l’année prochaine, pourquoi pas imaginer repousser l’élection présidentielle, et jusqu’à quand ? Nous touchons là aux fondements de notre République, aux principes de notre démocratie. 

Il y a naturellement urgence à lutter contre la pandémie et les élus locaux prennent leur part dans ce combat. Mais il ne faut pas opposer sécurité sanitaire et démocratie.

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