Faut-il un revenu universel d’existence en France ?

Revenu universel d'existence

Le contexte

Qu'est-ce que le revenu universel
Le revenu universel d’existence, parfois également appelé revenu inconditionnel de base, revenu de base ou revenu minimum d’existence, est un revenu qui serait versé à chaque individu sans aucune condition de travail, de participation à la vie publique ou d’emploi.
Il s’agirait donc d’une allocation mensuelle d’un montant suffisant pour vivre, cumulable avec d’autres revenus, distribuée par une communauté à tous ses membres, de la naissance à la mort, sur base individuelle, sans contrôle des ressources ni exigence de contrepartie. Cette allocation remplacerait de nombreuses prestations sociales conventionnelles existantes.
Depuis quand parle-t-on d'un revenu universel ?
L’idée d’un revenu de base inconditionnel a été esquissée pour la première fois par des auteurs littéraires utopistes, comme Thomas More ou Juan Luis Vives. Thomas Paine, révolutionnaire américain, détaille dans son oeuvre Agrarian Justice, parue en 1796, l’idée d’un revenu distribué à tous et qui proviendrait des revenus de la terre, puisqu’elle appartient à tous.

Voltaire développe l’idée dans son conte philosophique L’homme au quarante écus, paru en 1768. Dans cette oeuvre, la somme de quarante écus est la valeur locative de chaque terre du royaume, payée par les locataires de la terre et partagée équitablement entre chaque sujet.

Elle a ensuite été développée dans différentes formes par plusieurs économistes, comme John Stuart Mill, Condorcet, Milton Friedman, ou plus récemment Thomas Piketty.

Existe-t-il des expérimentations du revenu universel ?
Quelques expérimentations ont été mises en place dans différents pays du monde, et sous différentes formes.
L’Alaska applique par exemple aujourd’hui un dividende universel distribué à tous ses ressortissants et provenant des taxes sur les revenus du pétrole. Ce dividende seul ne permet toutefois pas d’en vivre ; il était d’environ 2000$ par an à son maximum en 2008, et de 878$ pour l’année 2012.

Plusieurs pays du Golfe (Qatar, Emirats arabes unis) ont également mis en place un revenu inconditionnel pour leurs citoyens, provenant des revenus du gaz et du pétrole. De fait, les ressortissants de ces pays ont un taux de pauvreté quasiment nul, et une part importante ne travaille pas. La majeure partie des travailleurs dans ces pays proviennent de pays plus pauvres, comme l’Inde, le Pakistan, etc.

Depuis début 2017, la Finlande a tiré au sort 2000 personnes parmi des demandeurs d’emploi pour expérimenter le revenu universel (fixé ici à 560 euros par mois) pendant 2 ans. Ces personnes garderont le droit à ce revenu pendant toute la durée de l’expérience, y compris si elles retrouvent un travail.

Le revenu universel en infographie

 

Infographie revenu universel

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LE « POUR »

Oui au revenu de base universel !

Billet rédigé par :

Logo MFRBArthur Mignon 

Membre du membre du Mouvement Français pour un Revenu de Base (MFRB)

www.revenudebase.info

Benoît Hamon, candidat à l’élection présidentielle, s’est prononcé en faveur de l’instauration d’un revenu universel. Sa victoire aux primaires socialistes (ainsi que l’implication d’autres candidats ou organisations de la société civile) a rendu réaliste ce qui, il n’y a pas si longtemps encore, pouvait être qualifié d’utopique : le droit de chaque être humain à devenir maître de son existence, grâce à la mise en place d’un revenu de base inconditionnel, universel et individuel.

Mais des inquiétudes subsistent : comment ne pas aboutir à une société duale, certains profitant de leur revenu d’existence pour « vivoter », quand d’autres seraient au travail ? Comment financer un revenu pour tous sans détruire la Sécurité sociale ?

À ces deux préoccupations, tout à fait légitimes, voici quelques réponses : le travail doit être repensé pour permettre une plus grande mobilité en toute sécurité afin que chacun puisse alterner entre formation, emploi, bénévolat sans avoir à subir les inconvénients actuels du chômage et de la précarité.

Un revenu sans condition remplaçant avantageusement certaines prestations de l’assistance sociale (RSA, aide au retour à l’emploi, allocation de solidarité aux personnes âgées…), sans toucher au système de chômage et de retraite, serait une garantie de sortie de la trappe à pauvreté engendrée par des dispositifs d’aide stigmatisants et excluants. Pour le Mouvement Français pour un Revenu de Base (MFRB), le revenu universel doit améliorer la protection sociale et non pas la détruire. Il permettrait de reconnaître la contribution de tous les membres de la société à la création de la richesse commune.

Du côté du financement, il y a une diversité de propositions. Il ne faut pas en effet s’arrêter au coût brut mais bien voir que le revenu de base viendrait améliorer le système existant. De plus, des systèmes alternatifs de monnaies libres, d’assouplissement quantitatif pour le peuple ou de revenu de base versé en monnaie locale complémentaire ouvrent de nouvelles perspectives en matière de création et de distribution monétaires.

« Un revenu parce qu’on existe, pas pour exister » : telle pourrait être la définition du revenu d’existence. Un revenu qui permettrait de sortir du travail subi pour aller vers le travail choisi « de chacun (volontairement) selon ses capacités, à chacun (inconditionnellement) selon ses besoins » selon Philippe van Parijs, co-fondateur du BIEN (réseau mondial pour le revenu de base).

Alors oui, mille fois oui, à un revenu universel d’existence émancipateur !

LE « CONTRE »

Le revenu universel, l’extension du domaine de la lutte inapropriée

Billet rédigé par :

Stéphanie Villers sur le revenu universelStéphanie Villers

Chef économiste

Le revenu universel est indispensable pour parer à la « raréfaction du travail ». Les emplois vont se comprimer à cause de la révolution technologique. Les robots vont remplacer les hommes. Le travail va devenir une denrée de plus en plus rare . Voilà le postulat du programme économique de Benoît Hamon.  Pour partie, cette hypothèse de base tient la route, mais elle reste pour l’heure une utopie.La substitution de l’homme par la machine peut être considérée comme l’ultime avancée d’un modèle économique efficient. Supprimer les tâches laborieuses, répétitives, sans  valeur ajoutée, les robotiser pour que les individus puissent se consacrer uniquement au développement de la  connaissance, de la culture et du bien-être est, sans doute, vers quoi l’humanité aspire.

Mais, nous sommes encore à des dizaines, voire des centaines d’années, de l’ère de la croissance générée sans capital humain. Aujourd’hui, l’économie traditionnelle fait face à une détérioration de sa rentabilité qui se traduit par des pertes d’emplois. En contrepartie, les start-up du numérique et des nouvelles technologies recèlent des besoins nouveaux. La confrontation de ces deux mondes créée de nouvelles tensions assorties de fortes frustrations.Mais,comme le rappelle Keynes, « la difficulté n’est pas de comprendre les idées nouvelles mais d’échapper aux idées anciennes ». Il faut donc accepter que les emplois d’hier soient détruits. Ils seront peu à peu remplacés par de nouveaux jobs reposant sur de nouvelles compétences. Jusqu’à présent, il n’y a jamais eu de progrès technique sans création d’emplois.

Alors, doit-on accompagner cette nouvelle révolution industrielle en distribuant à chaque jeune un revenu compensatoire ou ne vaudrait-il pas mieux consacrer cette somme à des formations d’avenir ?

Benoît Hamon propose de verser aux 18 – 25 ans une rémunération de 750 euros par mois. Il y a en France près de 8 millions de jeunes concernés, ce qui induirait un coût annuel de 72 milliards d’euros pour le financement de leur revenu universel. Orienter cette somme vers des formations pertinentes ne serait-il pas plus efficace ? On sait que ce sont les jeunes sans qualification qui sont les plus touchés par le chômage.

D’après l’INSEE, seulement 31% d’entre eux sont en emploi, contre plus de  80% de diplômés de l’enseignement supérieur. A l’heure où de nouvelles opportunités émergent grâce au numérique notamment, il faut mesurer le gâchis que représenterait  la mise sur le banc de touche de cette jeune génération qui a grandi à l’ombre des nouvelles technologies et qui en a une compréhension intuitive, contre tous les bénéfices à attendre de la formation des jeunes sans qualification pour les amener à créer leurs emplois de demain.

 

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