📋 Le contexte 📋
Très populaire chez les jeunes de 10 à 19 ans, TikTok est un réseau social créé en 2016 par l’entreprise chinoise ByteDance. L’application atteint en 2019 les 1,65 milliard de téléchargements selon une étude de SensorTower, et se propulse à la deuxième place des applications les plus téléchargées dans le monde, juste après WhatsApp. Le géant aux 176.9 millions de dollars de chiffre d’affaire est d’autant plus sûr de son essor qu’il est la seule application dans ce genre : avec la fin de Vine et le rachat de Musical.ly, TikTok n’a pas de concurrence.
TikTok fait un pari : celui de permettre aux utilisateurs et utilisatrices de laisser libre cours à leur créativité. Son concept est simple : l’application permet de créer de courtes vidéos (défis, chorégraphies) accompagnées d’effets visuels ou sonores. Il est possible ensuite de visualiser tous les contenus postés et d’y mettre un commentaire ou un “like”. L’ensemble de ce qui est publié s’est beaucoup diversifié, avec l’apparition de vidéos humoristiques, ou même d’informations et de discussions. Ce format inédit fonctionne puisque l’application comptabilise près de 625 millions d’actifs mensuels selon l’Agence des médias sociaux.
L’application est loin de faire consensus et a été au cœur de nombreuses critiques depuis sa création. Tout d’abord dénoncée parce qu’elle favoriserait le narcissisme et l’hypersexualisation des jeunes, TikTok a également été pointée du doigt pour avoir collecté illégalement des données de ses utilisateurs. Pourtant, c’est aussi une plateforme qui pourrait devenir un vrai support à la discussion et à l’échange d’idées et d’informations. Elle a notamment été centrale dans le mouvement Black Lives Matter, et de nombreux médias traditionnels se lancent désormais dans l’aventure. Malgré tout, la majeure partie des utilisateurs créent du contenu, suscitant les inquiétudes de certains face à la désinformation.
🕵 Le débat des experts 🕵
- Contre, TikTok est un ennemi de l'information. 44%, 151 vote151 vote 44%151 vote - 44% du total
- Pour, TikTok est un allié de l'information. 32%, 110 votes110 votes 32%110 votes - 32% du total
- Je ne sais pas. 24%, 82 votes82 votes 24%82 votes - 24% du total
Se rendre sur l’application la plus téléchargée de l’année 2020, TikTok, c’est décider de s’adresser à d’autres publics que ceux utilisant les canaux attendus pour s’informer. C’est tant mieux.
« J’irai où tu iras, mon pays sera toi ». Le refrain de Céline Dion que l’on se plait à entonner résonne. Il s’agit bien d’aller vers les jeunes en étant bien attentif à leurs habitudes comme à leurs modes de consommation des médias. Du nombre de téléchargements au temps passé chaque jour, le réseau social fondé en Chine en 2016 par Zhang Yiming continue à se détacher des autres. A l’heure du confinement et du couvre-feu, maintenir le lien est crucial, TikTok y participe pleinement à sa manière. Aussi, dans les conversations, les allusions des jeunes à TikTok sont légion. Marques et organisations l’ont bien compris, en témoigne leur présence manifeste.
Les médias sont, eux aussi, de plus en plus nombreux à investir ce réseau pour conquérir ou confirmer de nouvelles cibles prescriptrices. De France Culture au Figaro, ils sont présents et publient régulièrement sur ce canal. Le Monde a ainsi réalisé des lives bien menés sur ce réseau en étant dans l’interaction avec les utilisateurs. La pédagogie est de mise pour expliquer et décrypter. On retrouve sur le compte M6 des figures identifiées aisément par cette cible ; à l’image de Cristina Cordula chantant du Jul. Conversations et engagements assurés.
Informer tous les publics
On ne démentira pas la sentence de Marshall McLuhan sur l’importance du medium. Le choisir est un sujet en tant que tel et fait parler de lui. On se souvient de la prise de parole du Chef de l’Etat pour féliciter les nouveaux bacheliers en juillet dernier. Agenda et format adapté à cette cible. On en retient le choix du support. L’éditorialisation et les angles sélectionnés par les médias sont effectivement pensés pour cette cible jeune. En revanche, il s’agit d’éviter de surjouer le cool et les codes utilisés par les jeunes fait naitre le risque de tomber à plat et d’être très peu audible. Un exercice de style ou une chorégraphie à réaliser tout en finesse. Cela vaut le coup d’œil. Les spectateurs sont là.
Avec plus de 800 millions d’utilisateurs actifs dans le monde, il ne fait aucun doute que TikTok est devenue une force de frappe nucléaire dans la guerre informationnelle mondiale ! Les politiques ne s’y trompent pas, Emmanuel Macron en tête qui y a félicité les lycéens pour leur bac à l’été 2020. Les médias traditionnels ne sont pas en reste qui s’y investissent aussi afin de répondre au même enjeu de société majeur : toucher le jeune public – les moins de 24 ans – lesquels se détournent des médias traditionnels mais restent très sensibles aux enjeux du monde et sont prêts à s’engager. Le succès incontestable du hashtag #blacklivesmatter avec plus de 10 milliards de mentions en est la démonstration éclatante.
Pourtant, application chinoise, TikTok est une arme de désinformation et de propagande massive ! Ainsi par exemple, l’application publie depuis mars 2019 des centaines de milliers de videos niant la dangerosité du COVID-19 et appelant à refuser les mesures sanitaires comme le port du masque. Si les modérateurs de l’application ont finalement supprimé en juillet 2020 un certain nombre de ces vidéos en réaction aux critiques des médias traditionnels, elle supprime en revanche volontiers de nombreux contenus jugés comme « incommodants ou indésirables » par le pouvoir politique chinois, se faisant ainsi le bras armé de la censure chinoise. Ainsi des contenus sur l’emprisonnement des Ouïgours ou les manifestations étudiantes à Hong-Kong ont été supprimées sans aucune explication. Bref, sa politique de modération est à deux vitesses !
En revanche, les campagnes de dénigrement comme par exemple #Autismchallenges parodiant les personnes autistes sont légion. Par ailleurs, TikTok ayant ouvert son application à la publicité six mois après son lancement, il apparaît qu’elle favorise les videos de jeunes filles dénudées et/ou en position sexy car celles-ci sont les plus regardées et donc les plus rentables pour l’application. The Guardian a même fait état en 2019 d’une consigne interne consistant à « ne pas supprimer les videos de mineurs si les modérateurs ne parviennent pas à déterminer si la victime à l’air de ne pas avoir 18 ans », au grand dam des protecteurs de l’enfance. TikTok est donc un outil de marketing digital dont la puissance de frappe nucléaire peut influer sur les perceptions et les opinions des jeunes au niveau mondial. Si nous sommes ce que nous mangeons, nous pensons ce que nous regardons, écoutons et lisons ! Pour devenir des acteurs responsables de la vie citoyenne, soyons exigeants sur nos sources d’informations ! Oui à TikTok pour se divertir, Non pour s’informer et prendre des décisions.
