Parlementaires français en Crimée : fallait-il y aller ?

Une photo publiée sur le compte twitter d'un des parlementaires en Crimée

Numéro 1

S’informer

Qu'est-ce que la Crimée ? Où est la Crimée ?
La Crimée est une péninsule dans la mer Noire, située au sud de l’Ukraine et à l’Ouest de la Russie. La ville la plus connue y est Yalta, une station balnéaire où se sont rassemblés Churchill, Staline et Wilson en 1945.

Crimée
Emplacement de la Crimée, en vert
Quelle est la situation de la Crimée ?
Historiquement, après la seconde guerre mondiale, la Crimée appartenait à l’URSS. A partir de 1953, la région est rattachée à la République socialiste soviétique d’Ukraine.

A la chute de l’URSS en 1991, la Crimée se déclare indépendante, avant de se rattacher à l’Ukraine après un accord entre le Parlement ukrainien et le Parlement de Crimée.  La Russie reconnaît ce rattachement en 1995.

En 2014, suite à la révolution ukrainienne, la Crimée annonce qu’elle ne reconnaît pas le nouveau gouvernement ukrainien, et se proclame donc indépendante le 11 mars. Un référendum est organisé une semaine après sur le rattachement à la Russie, et le oui l’emporte avec près de 97 %. Aujourd’hui, la majeure partie de la communauté internationale ne reconnaît pas ce rattachement.

Qui est allé en Crimée ? Dans quel contexte ?
Les 22 et 23 juillet 2015, dix parlementaires français, huit députés (dont Thierry Mariani, ancien ministre de Sarkozy, et Marie-Christine Dalloz) et deux sénateurs, se sont rendus en Crimée. Ils appartiennent au parti les Républicains, à l’exception d’Yves Pozzo di Borgo (UDI) et Jérôme Lambert (groupe radical).

Les présidents de l’Assemblée nationale et du Sénat étant opposés à ce déplacement en Crimée, les parlementaires s’y sont rendus à titre personnel.

Ce déplacement a fait réagir le gouvernement, par l’intermédiaire notamment du ministre des Affaires étrangères Laurent Fabius, qui a condamné ce déplacement.

Numéro 2

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LE « POUR »

Oui il fallait aller en Crimée !

Billet rédigé par :

Marie-Christine DALLOZ

Député Les Républicains – 2ème Circonscription du Jura
http://www.mcdalloz.fr

Surprise par les réactions politiciennes et les commentaires publiés en parfaite méconnaissance du programme de notre déplacement, je souhaite expliquer pourquoi il fallait aller en Crimée.

Dernièrement le Conseil de l’Europe a retiré le droit de vote de la Fédération de Russie au sein de cette assemblée. En tant que Membre de l’Assemblée Parlementaire du Conseil de l’Europe, il me semblait important de mesurer, par moi-même, les enjeux et les conséquences de cette décision.

Dans sa quasi-unanimité, la presse a toujours eu un avis très tranché sur l’annexion de la Crimée par la Fédération de Russie. Aussi voulais-je me rendre compte et apprécier le ressenti de la population et comprendre sa volonté suite au référendum du 16 mars 2014.

Nous avons rencontré beaucoup de personnes en Crimée lors de ce déplacement : des élus, des représentants de minorités et des citoyens dans la rue. Pour avoir beaucoup échangé avec une des minorités, à savoir les Tatares de Crimée, je pense pouvoir dire que les mesures imposées par l’Ukraine à ce peuple étaient difficilement acceptables. Par exemple, ils n’étaient autorisés à parler leur langue que deux jours par semaine. Depuis l’appartenance de la République de Crimée à la Fédération de Russie, le Tatare de Crimée est l’une des trois langues officielles de la Crimée. L’histoire de la Crimée a par ailleurs été beaucoup plus longue avec la Russie (trois siècles) qu’elle ne l’a été avec l’Ukraine (61 ans). La population de Crimée se sent ainsi naturellement plus proche de la Fédération de Russie que de l’Ukraine. J’ai aussi pu constater de mes propres yeux le retard de ce pays, en matière d’infrastructures routières notamment, une agriculture très peu développée, sans aucune mécanisation, une économie quasi-inexistante : c’est la réalité quotidienne de cette population.

Je me dois de préciser que je ne suis pas allé en Crimée, ni au nom de la France ni au nom de l’Assemblée Nationale, mais bien à titre personnel. Enfin il me semble très important de conserver un dialogue avec la Russie, la puissance économique qu’elle représente et les liens culturels forts qui ont existé dans un passé récent.

En conclusion, aller constater, sur place et sans filtre, les conséquences du blocus imposé à la population et par voie de fait, les réactions de la Russie sur nos exportations et notamment au niveau de l’agriculture française était indispensable pour la Député de la Nation, membre de l’Assemblée Parlementaire du Conseil de l’Europe que je suis.

LE « CONTRE »

Les parlementaires en Crimée : une faute politique !

Billet rédigé par :

Chantal Guittet

Députée PS du Finistère Présidente du Groupe d’Amitié France-Russie de l’Assemblée Nationale
http://www.chantalguittet29.fr/

Cette tribune est parue initialement le 23 juillet à cette adresse, et est publiée ici avec l’aimable autorisation de Madame Guittet.

Je déplore et condamne vivement la visite de la délégation parlementaire en Crimée.

Pour justifier leur voyage, les membres de cette délégation invoquent la nécessité de renouer le dialogue avec les Russes et le besoin d’aller observer ce qui se passe en Crimée.

A cela,  je réponds que le dialogue n’a jamais été rompu avec les Russes. Bien au contraire, les autorités russes font partie de ce que nous appelons la formation dite de « Normandie » pour trouver une solution à la crise ukrainienne.

D’autre part, cette délégation ne pourra voir que ce que les autorités voudront bien leur montrer.

Et même si les membres de ce groupe le nient, leur présence en Crimée est une forme de reconnaissance de l’annexion de cette dernière par la République de Russie.

Et ne soyons pas naïfs,  les autorités russes vont instrumentaliser leur venue pour pointer du doigt la division des Européens en montrant  que certains  parlementaires approuvent leur politique.

Même si  ces parlementaires n’ont aucun mandat, ni de la part de l’Assemblée Nationale, ni du groupe d’amitié Franco-russe que j’ai l’honneur de présider, leur déplacement à titre individuel viole le droit international, en ignorant les autorités ukrainiennes, ce qui n’est pas admissible.

 Ce genre d’initiative est contraire aux traditions républicaines et nuisent à l’action de la diplomatie française.

 

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