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Protégeons la santé physique et psychique de nos enfants !
J’ai été rapporteure à l’Assemblée nationale pour la proposition de loi portant sur la suppression de la publicité dans les programmes pour enfants de la télévision publique. Cette proposition de loi a été adoptée jeudi 14 janvier 2016.
De nombreux spécialistes (pédiatres, pédopsychiatres,…) dénoncent régulièrement les effets néfastes de la publicité sur la santé et le psychisme des enfants. La publicité fait appel au pulsionnel plus qu’au rationnel ; elle entraîne ainsi un manque d’attention, une relation aux adultes faussée (« c’est celui qui m’achète le plus qui m’aime le plus »), une hyperconsommation précoce, le développement des stéréotypes (de genre par exemple)… La santé physique des enfants est aussi menacée, avec le risque de mauvaises habitudes alimentaires pouvant conduire, entre autres, à l’obésité.
Le coût de la suppression de la publicité dans les programmes jeunesse de la télévision publique s’élèverait à moins de 15 millions d’euros, soit à peine 0,5% du budget de France télévision. Pour compenser cette perte, des solutions existent : ainsi, on pourrait utiliser la taxe sur les opérateurs de communication numérique instaurée en 2009 pour compenser les pertes dues à la suppression de la publicité sur les chaînes publiques après 20 heures et qui n’est pas intégralement versée à France Télévision. Une refonte de la redevance est également envisageable, compte-tenu de la multiplication des écrans numériques, etc.
A l’étranger, la suppression de la publicité dans la télévision publique et/ou dans les programmes jeunesse est déjà effective dans de nombreux pays : en Suède, une législation stricte interdit depuis 1991 la publicité destinée aux enfants de moins de 12 ans, il en est de même au Québec où la publicité commerciale destinée aux enfants de moins de 13 ans est strictement interdite sur les télévisions privées et publiques ; les programmes jeunesse de la RTBF (télévision publique belge) ne comportent pas de publicité cinq minutes avant et cinq minutes après les programmes jeunesse ; au Royaume-Uni ou encore en Espagne, la publicité est totalement interdite sur les chaînes publiques (BBC et RTVE). Ces dispositions ont été appliquées avec succès.
La suppression de la publicité dans les programmes jeunesse permettrait donc de préserver la santé physique et psychique de nos enfants et redonnerait ses lettres de noblesses aux valeurs de la télévision publique.
Oser les vraies réformes de l'audiovisuel public
On ne peut être contre la suppression de la publicité sur les programmes pour enfants et pourtant je me suis opposé à la proposition de loi du groupe écologiste visant à l’interdire sur France Télévision et ce pour deux raisons.
La première a trait particulièrement à la situation financière du groupe France Television.
En effet, chaque année, le Parlement s’interroge sur la pérennité du financement du groupe public de Télévision.
La suppression de la publicité sur les programmes pour enfants va entraîner une perte de 20 millions d’euros dans le budget de France Télévision ce qui aura des répercussions fâcheuses et mettra en péril l’accomplissement de ses missions.
C’est pourquoi je regrette que ce sujet soit abordé sous cet angle.
Je suis pour ma part partisan de la suppression totale de la publicité sur le service public, à l’instar de la BBC. Mais ceci ne serait possible qu’à partir du moment où une réforme d’ensemble serait engagée, sans tabou, en envisageant de revoir aussi la voilure de France Télévision.
On ne peut donc accepter une réforme comme celle là qui fragiliserait le service public sans apporter de réponse réelle à la protection des enfants téléspectateurs.
Ceci m’amène à venir à la deuxième raison qui fait que je suis opposé à cette mesure.
Les enfants ne regardent pas seulement les programmes de France Télévision. Ils regardent aussi les programmes des chaînes privées et aussi les programmes diffusés sur Internet. Or rien n’est envisagé dans ces domaines.
Ainsi, la volonté de protéger les enfants est-elle limitée et donc inefficace.
Aussi, je demande sur ce sujet une vision plus globale plutôt que de se contenter d’effets d’annonces en trompe l’œil qui n’atteindront aucun des objectifs annoncés.