En 7 dates importantes, on vous résume (presque) tout ce qu’il y a à savoir sur l’indépendantisme corse.
LE DÉCRYPTAGE DE L’ACTU
Chaque semaine, on essaye de comprendre pour vous un sujet qui fait l’actu, mais qui peut paraître un peu ardu…
1. 1755, Pascal Paoli, chef de la République corse indépendante
Depuis 1729, les Corses se soulèvent après quatre siècles de rattachement à la République de Gênes et se déclarent indépendant en 1735. Gênes, avec le soutien Français, tente de reconquérir l’île. Battus, les insurgés reprennent les armes en 1755 sous la conduite de Pascal Paoli, proclamé général de la Nation.
La même année, la Constitution corse, souvent considérée comme la première constitution démocratique de l’histoire moderne, est adoptée. Elle sépare le pouvoir exécutif, législatif et judiciaire et s’organise sur un suffrage universel indirect pour tous les chefs de famille (qui peuvent être des femmes).
2. 1768, Le début de la Corse française
Lassé de la guerre, Gênes cède « provisoirement » ses droits sur la Corse, qu’elle ne contrôle plus dans les faits, à la France de Louis XV par le traité de Versailles du 15 mai 1768. Le roi de France refuse de reconnaître l’indépendance de la République corse, envoie son armée et proclame la réunion de la Corse à la France. En 1769, les troupes de Pascal Paoli sont vaincues, il s’exile en Grande-Bretagne. La Corse passe officiellement sous administration française, sous les critiques de philosophes des Lumières comme Rousseau et Voltaire.
En 1790, les révolutionnaires français rappellent Pascal Paoli pour le placer comme commandant de l’île. Suite à des mésententes avec la Convention nationale (le régime politique français de septembre 1792 à 1795) et inquiété par la Terreur, il négocie pour la création d’un Royaume de Corse sous la protection de la Grande-Bretagne en 1794. L’île de beauté redevient française en 1796. Pascal Paoli et sa Constitution resteront des symboles de l’indépendantisme Corse. Napoléon Bonaparte, né à Ajaccio en 1769, devient empereur des français en 1804.
3. 1957, le département le plus pauvre de France
Le long du XXe siècle, la Corse perd la moitié de sa population suite au chômage et aux difficultés économiques de l’île. De plus, l’île se voit doter de nombreux villages pour les touristes qui font augmenter les prix de l’immobilier. En 1957, un grand plan d’action pour remettre l’économie de la Corse à flots est enclenché. La SOMIVAC (Société d’aménagement pour la mise en valeur de la Corse) mène de grands travaux d’aménagement, d’électrisation et d’irrigation sur la plaine orientale.
Cependant, des dizaines de milliers de pieds noirs sont rapatriés d’Algérie après et avant son indépendance et, dans l’urgence, ils vont récupérer 90 % des terres habitables et cultivables initialement promises aux paysans corses. Un mécontentement corse qui se manifeste par des grèves. L’isolement de l’île accélère la radicalisation des revendications. On passe de régionalisme à autonomisme pour atteindre l’indépendantisme.
4. 1976, Naissance du Front de libération national corse
Les 21 et 22 août 1975, une douzaine de militants armés de l’Action régionalistes corses (ARC) occupent une cave viticole tenue par un pied noir à Aléria, pour protester contre les escroqueries dans le domaine viticole et les conditions d’installations des rapatriés d’Algérie au détriment des corses sur l’île.
En réaction, le gouvernement français envoie 1 200 CRS, des blindés et des hélicoptères encerclent le bâtiment. Deux gendarmes sont tués et un militant est sérieusement blessé. Des violentes émeutes traversent le pays en opposition à la réponse musclée du gouvernement. Des blindés sont à nouveau envoyés.
Dans la nuit du 4 au 5 mai 1976, le Front de libération national corse (FLNC) annonce sa création par une série d’attentats à la bombe. Il lutte pour la libération nationale, la sortie de la République française par tous les moyens, y compris armés. Depuis 1976, 10 500 attentats ont été commis sur l’île (moins de la moitié revendiqués).
5. Années 1990, le schisme entre indépendantistes et autonomistes
Les différents qui traversent le mouvement se font de plus en plus violents. À tel point qu’il se sépare en deux principales branches, le FLNC Canal-Historique (favorable à l’Indépendance) et le FLNC Canal habituel (qui défend l’autonomie sans pour autant abandonner la lutte armée). Une quinzaine de morts sont à déplorer lors des affrontements fratricides en 1994-96.
Sur le plan politique, l’indépendance correspond à une situation d’autogouvernance et de souveraineté d’un territoire. L’autonomie permet à un territoire de bénéficier de lois particulières.
En février 1998, le préfet de Corse, Claude Érignac est assassiné dans les rues d’Ajaccio. Il est tué par balles par un petit groupe d’indépendantistes proches du FLNC, qui espèrent relancer la lutte, dont le berger Yvan Colonna. Ce dernier ne sera arrêté qu’en 2003 alors qu’il fuyait dans le maquis. Alain Ferrandi, Pierre Alessandri et Yvan Colonna sont condamnés à perpétuité.
6. 2015, les nationalistes à l’Assemblée de Corse
Dans un communiqué de 2014, le FLNC annonce cesser la lutte armée. Le climat se pacifise.
Le 13 décembre 2015, la liste nationaliste « Pè a Corsica » (Pour la Corse), qui unit les autonomistes et les indépendantiste, arrive en tête au deuxième tour des élections territoriales avec plus de 35 % des voix. La coalition est réélue en 2017 à la marge majorité (plus de 56 % des voix) au second tour et obtiennent la majorité absolue à l’Assemblée de Corse. Cette victoire, en plus du nouveau statut de « collectivité de Corse » qui décentralise le pouvoir depuis 2018, laisse entrevoir un dialogue vers une autonomie.
7. 2022, La mort d’Yvan Colonna ravive les revendications
Mercredi 2 mars, Yvan Colonna, incarcéré à Arles, a été attaqué par un codétenu. Deux semaines plus tard, le 21 mars, il meurt des suites de l’agression. De nombreuses manifestations sont organisées en son honneur mais également contre l’Etat français jugé complice. Ils s’interrogent sur la possibilité d’une agression alors que Colonna est beaucoup plus surveillé du fait de son statut de DPS, détenu particulièrement signalé.
La jeunesse s’empare de cette affaire de manière plus virulente on bloquant les collèges, les lycées et l’université. Des affrontements avec les forces de l’ordre ont lieu. Yvan Colonna est considéré comme une figure moderne du mythe du bandit d’honneur, une personne qui se cache dans le maquis et qui vit de la solidarité des habitants, par tradition. Pour calmer la situation, le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin en visite sur l’île se dit ouvert à son autonomisation. Déclaration électoraliste ou promesse de dialogue ? Le temps nous le dira.
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