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Le volet « activité » du mot RSA est en panne !
Éric Straumann
Député du Haut-Rhin Président du Conseil départementalLes élus locaux le constatent chaque jour, le volet « activité » du mot RSA est complètement en panne. Les effets désastreux du chômage de masse perdurent et s’amplifient. La France comptait, fin 2015, 2,5 millions de foyers au RSA.
Cette situation n’est pas acceptable.
Elle est socialement très destructrice pour les allocataires du RSA dont près de la moitié sont dans le dispositif depuis plus de 4 ans.
Elle fragilise aussi les départements qui doivent aujourd’hui supporter à la place de l’État plus de 4 milliards d’euros de dépenses liées au versement du RSA. En 2016, près de la moitié des départements devront même différer certaines dépenses pour pouvoir assurer le paiement des allocations des mois de novembre et décembre.
4 milliards d’euros, c’est autant d’argent qui n’est plus consacré à d’autres politiques essentielles : l’équipement des collèges, l’aménagement du réseau routier, l’accompagnement des familles, des seniors, des personnes en situation de handicap. Cela impacte aussi les investissements et donc l’activité des entreprises locales, tout particulièrement le BTP.
Des solutions pour favoriser l’insertion sociale et professionnelle existent mais sont souvent très difficiles à mettre en œuvre par les élus locaux car l’État tend à vouloir faire des départements de simples guichets de paiement.
Pour autant, en tant qu’élus en responsabilité, nous avons le devoir d’agir.
L’engagement associatif est particulièrement développé en Alsace. Les valeurs du monde associatif sont des marqueurs régionaux.
L’un des maux du chômage de longue durée c’est l’isolement qui éloigne de plus en plus les allocataires du RSA du monde du travail. Or, ce lien social est vital et l’engagement associatif doit pouvoir redonner aux allocataires toute leur place dans la société. C’est une étape essentielle pour retrouver un chemin de vie positif, pour rendre chacun davantage acteur de son parcours de vie. Cela doit aussi permettre de casser les préjugés.
Cette démarche volontariste repose sur l’idée du juste droit : le respect du devoir collectif de solidarité et l’engagement personnel à s’investir dans les démarches pour retrouver le chemin de l’emploi.
Enfin il est important de dire que toutes les solutions ne peuvent pas simplement dépendre de la seule action des pouvoirs publics. Les élus locaux doivent aussi pouvoir activer tous les leviers qui sont à leur disposition. La société, à travers la vitalité, la richesse et la diversité des associations, offre d’innombrables ressources qu’il faut pouvoir mobiliser. C’est ce que nous cherchons à faire à travers cette démarche novatrice.
Une fois de plus on stigmatise les pauvres
Faut-il conditionner le versement du RSA à des heures de bénévolat ?
Le département du Haut-Rhin a annoncé en février vouloir conditionner le versement du RSA (revenu de solidarité active) à sept heures de bénévolat par semaine, depuis d’autres départements aimeraient l’imiter.
Rappelons ici que le droit fondamental à des moyens convenables d’existence est reconnu par notre Constitution. Les minimas sociaux, comme le RSA, permettent de respecter ce droit. Une fois de plus on stigmatise les pauvres comme étant des profiteurs alors que la très grande majorité d’entre eux se démène chaque jour. Le RSA n’est pas un choix, c’est le dernier filet de la solidarité nationale.
Contraindre les personnes, ce n’est pas les responsabiliser.
Forcer la participation à un projet associatif lorsque l’on a déjà une vie bien difficile remplie de soucis quotidiens : comment nourrir sa famille, se vêtir, payer la cantine… c’est indécent.
Le département de la Drôme a mis en place un dispositif similaire mais basé sur le volontariat. La différence est notable puisque le dispositif est « gagnant-gagnant ». D’une part pour les associations qui ont de réels besoins et d’autre part pour les bénéficiaires du RSA qui exercent une activité pour maintenir un lien social et à terme favoriser leur retour à l’emploi, sans contrainte.
Oui les associations ont toujours besoin de nouveaux bénévoles, mais l’engagement associatif doit rester un choix de la personne et non une contrainte – imposée par le département dans le cas présent.
Oui, l’implication associative peut être un premier pas vers l’emploi.
Ces 7 heures de « bénévolat » impliquent pour les personnes en situation de précarité de s’organiser pour le transport (surcoût), trouver une nourrice pour une journée par semaine est compliqué et coûteux. Cette mesure va complexifier le quotidien de familles qui ont déjà tant de mal à joindre les deux bouts.
Si l’on est capable de trouver du travail à raison de 7 heures par semaine à 20 000 personnes dans le Haut-Rhin alors pourquoi ne pas concentrer nos efforts à leur trouver un emploi stable et pérenne ?
Car nous le constatons tous les jours sur le terrain, les personnes en situation de précarité accordent une grande importance au travail afin d’assurer le meilleur avenir possible à leur famille.
La finalité de cette proposition est, en réalité un bras de fer entre l’État et les départements dont les plus pauvres sont les otages. Nous vivons en France, 6e puissance mondiale ! N’oublions pas de respecter l’égale dignité de chacun.