L’aide au développement est-elle efficace ?

Débat aide au développement
Crédits : Chor Hung Tsang

Numéro 1

S’informer

Qu'est-ce que l'aide au développement ?

L’aide au développement désigne l’ensemble des ressources fournies aux pays pauvres dans le but déclaré de favoriser le développement économique et d’améliorer le niveau de vie de leurs habitants.

Elle aurait été impulsée par le président des États-Unis, Harry Truman, notamment dans son discours sur l’état de l’Union du 20 janvier 1949.

Elle prend alors plusieurs formes. Elle peut se matérialiser en dons, prêts d’argent à taux préférentiel et annulation de dettes.

Quand le donateur est un pays ou une entité publique, on parle d’aide publique au développement (APD). Pour la France, c’est l’Agence française de développement (AFD) mais elle peut aussi venir d’un groupe de pays par l’intermédiaire d’une organisation internationale (comme le FMI ou la Banque mondiale…).

L’aide peut cependant venir d’une entité interne au pays même (filiale de multinationales implantées dans un pays) et d’aide privée d’entreprises, d’ONG, de fondations…

Source : Le Monde Diplomatique

Et concrètement, comment ça marche ? Et pour quelle activités?

En principe, les projets de développement sont mis en place conjointement par un bailleur de fonds et des acteurs locaux des pays en développement. Un budget est ainsi établi avec une unité de lieu et de temps précise.

Ils peuvent couvrir plusieurs secteurs et sont uniques à chaque pays et partenaires. Cela peut aller de la formation et éducation de la population à des appuis aux filières agroalimentaires, paysannes, aux infrastructures ou aux politiques locales.

Pourquoi on en parle en ce moment ?
Dans le cadre de notre numéro en partenariat avec l’AFD, nous avions exploré plusieurs sujets autour de la lutte contre les inégalités. L’aide au développement fait souvent l’objet de long débats quant à son efficacité et impact réel dans l’économie des pays choisis.

Ainsi, certaines ONG locales dénoncent le manque de transparence de certaines aides dans des pays qui subissent la corruption et des détournements de fonds. De plus, elles n’impliquent pas toujours les diversités culturelles des pays.

L’occasion pour nous d’explorer les arguments POUR et CONTRE !

Numéro 2

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Le principe du Drenche est de présenter l’actualité sous forme de débats. Le but est qu’en lisant un argumentaire qui défend le « pour » et les arguments du camp du « contre », vous puissiez vous forger une opinion ; votre opinion.

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LE « POUR »

Une des plus grandes ambitions de notre humanité commune

Billet rédigé par :

Robin GUITTARD

Responsable de campagne "Financement du développement" chez Oxfam
http://www.oxfamfrance.org/

L’efficacité de l’APD est une question primordiale. Non seulement par les sommes qu’elle recouvre (près de 150 milliards de dollars par an), mais surtout par les enjeux qu’elle représente : éradiquer la pauvreté et la faim, garantir à tous un accès à des services de santé et d’éducation de qualité, mettre fin aux pandémies, atteindre l’égalité entre les femmes et les hommes, lutter efficacement contre les discriminations. Le tout dans un cadre qui accompagne et renforce la lutte contre les changements climatiques : les Objectifs de Développement Durable adoptés par l’ONU en 2015. Rien de moins qu’une des plus grandes ambitions de notre humanité commune !

L’APD a un rôle unique à jouer

Alors si l’APD n’est pas en mesure, et ne prétend de toute façon pas, d’atteindre seule ces objectifs, elle peut et doit être un instrument central à leur réalisation. Selon l’OCDE, l’APD correspond aux flux d’argents des pays les plus riches vers les pays pauvres pour accompagner leur développement économique et leur bien-être. Par nature l’APD est donc une ressource publique et a un rôle unique à jouer. En comparaison d’autres flux de nature privés, l’APD n’est pas liée à des enjeux commerciaux et ne répond pas à des intérêts privés. Elle peut donc mobiliser tout son potentiel pour s’attaquer à la lutte contre la pauvreté et les inégalités, par exemple en garantissant l’accès pour tous à des services de santé et d’éducation de qualité ou encore en apportant une aide humanitaire dans les zones de crises et de conflits à travers le monde.

Des progrès considérables pour lutter contre les inégalités

L’APD joue donc un rôle fondamental. Elle a permis de réaliser des progrès considérables dans la lutte contre les grandes pandémies, notamment à travers le Fonds mondial de lutte contre le sida, le paludisme et la tuberculose. Depuis 2002 ce sont plus de 27 millions de vies qui ont été sauvées ! L’APD a aussi permis de scolariser 77 millions d’enfants en plus et d’augmenter significativement la scolarisation des filles à travers le Partenariat mondial pour l’éducation établi également en 2002. L’APD est également un outil de renforcement démocratique en soutenant la bonne gouvernance, les institutions publiques, le renforcement des sociétés civiles, mais aussi la collecte de l’impôt pour financer les services publics.

Il faut renforcer sa transparence et s’assurer qu’elle soit cohérente

Bien sûr, l’APD est loin de tout reproche. Elle est notamment trop souvent manipulée par les Etats bailleurs pour favoriser leurs intérêts géopolitiques ou commerciaux. Ainsi, ces dernières années nombre de pays ont eu tendance à dévier l’APD pour réguler les flux migratoires ou encore répondre à des enjeux sécuritaires, notamment de lutte contre le terrorisme. Or, l’APD doit servir les besoins des Etats qui la reçoivent, il faut donc renforcer sa transparence et s’assurer qu’il y ait cohérence entre les politiques menées par les Etats. L’APD doit agir en complément de politiques commerciales, agricoles, fiscales ou encore environnementales qui participent au développement durable des pays les plus pauvres, au risque sinon de faire de l’APD un pansement sur une hémorragie grave.

LE « CONTRE »

Rapprochons la société civile locale de leur gouvernement

Billet rédigé par :

Jean-Jacques SCHUL

IDAY, Raising Voices for African education
https://iday.org/

En 2009, le Fonds Monétaire International montrait que l’aide publique de certains pays avaient un effet positif, d’autres négatif. La grande majorité des recherches économiques conduites depuis 1975 démontrent que globalement l’aide extérieure est soit sans effet, soit a un effet négatif : au plus un pays reçoit de l’aide, au moins il se développe et donc au plus il reste pauvre.

L’examen des programmes d’aides n’inclut pas les effets réels

On constate que depuis 60 ans, les pays ou régions qui ont reçu le plus d’aide, sont ceux qui se sont le moins développés ; inversement celui qui a le plus progressé l’a fait quasiment sans aide étrangère. Les promoteurs de l’aide publique basent leur assertion sur l’analyse des seuls intrants. Ainsi, l’examen des programmes d’aide des membres de l’OCDE par leurs pairs ne comparent que les intrants type et montants d’aide), pas leurs effets réels.

Les raisons de l’échec sont  : 

  • les conditions de la réussite de l’aide étrangère telles qu’énoncées par W. Rostow (1962) – économie au stade de décollage (croissance économique plusieurs multiples de la croissance démographique) et bonne gouvernance des autorités sont rarement respectées 
  • les  bénéficiaires doivent s’approprier les investissements financés (Banque Mondiale 1992) alors que la plupart des donateurs publics dictent les thèmes et conditions de leurs dons
  • les donateurs couvrent leurs frais administratifs excessifs en choisissant des projets chers (Judith Tendler 1975) qui les rendent inadaptés aux conditions locales et empêchent leur démultiplication 
  • l’argent est fongible : les dons extérieurs, privés comme publics remplacent les dépenses budgétaires que devraient faire les gouvernements récipiendaires et soutiennent donc indirectement la corruption (Clark Gibson 2010 « le dilemme du Samaritain »)
  • l’aide publique est souvent réservée à des entreprises du pays donateur qui transfèrent leurs bénéfices à l’étranger et privent les gouvernements locaux des ressources pour financer les services sociaux (EURODAD)…

Des procédures corporatistes coloniales

En plus, la Belgique suit des procédures corporatistes coloniales : les fonds sont réservés à quelques ONG nationales qui empêchent l’accès aux fonds publics par des intervenants moins chers et plus innovateurs tels que les petites associations plus proches de la société civile locale.

Toutefois, nous devons rester solidaires (John Rawls 1972) envers les plus démunis. Pour rendre les aides publiques et privées efficientes il faut qu’elles rapprochent la société civile locale de leur gouvernement (Amartya Sen (1998) et Angus Deaton (2015), deux prix Nobel d’économie) ce que ne font que quelques rares opérateurs comme IDAY-International.

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