📋 Le contexte 📋
La rénovation énergétique désigne l’ensemble des travaux du bâtiment visant à diminuer la consommation énergétique du bâtiment et de ses habitants ou utilisateurs (locaux tertiaires). C’est une composante importante de la transition énergétique et au-delà de la réhabilitation écologique.
Les parlementaires ont récemment précisé la définition légale d’une rénovation énergétique « performante » dans la loi climat-résilience publiée le 24 aout au Journal Officiel. Elle le sera quand une classe A ou B du nouveau DPE sera atteinte à l’issue des travaux ou un saut de deux classes énergétiques. Le texte cible six postes de travaux à réaliser : l’isolation des murs, l’isolation des planchers bas, l’isolation de la toiture, le remplacement des menuiseries extérieures, la ventilation, la production de chauffage et d’eau chaude sanitaire ainsi que les interfaces associées. Une exception existe pour les passoires classées F et G qui devront atteindre seulement la classe C.
Toujours dans cette loi, une rénovation performante est qualifiée de « globale » lorsqu’elle est réalisée en moins de 18 mois pour les logements individuels, et en moins de 24 mois pour les autres bâtiments résidentiels, et lorsque les six postes de travaux ont été traités.
Le 20 juillet, les députés et les sénateurs ont définitivement adopté le projet de loi Climat et résilience issu de la commission mixte paritaire (CMP). En métropole, à partir du 1er janvier 2025, la loi prévoit ainsi d’interdire de louer les passoires thermiques classées G du nouveau diagnostic de performance énergétique (DPE) (en vigueur depuis le 1er juillet). Soit 600 000 logements concernés. Et à compter du 1er janvier 2028 pour le reste des passoires classées F représentant 1,2 millions de logements. Puis l’interdiction de louer s’appliquera dès le 1er janvier 2034 pour les logements classés E (soit 2,6 millions de logements concernés).
Ces logements seront ainsi progressivement considérés comme indécents et donc interdits à la location au regard de la loi. Le locataire pourra alors exiger de son propriétaire qu’il effectue des travaux et plusieurs mécanismes d’information, d’incitation et de contrôle viendront renforcer ce droit.
Un an après la promulgation de la loi, les propriétaires ne pourront plus augmenter le loyer des logements classés F et G lors du renouvellement du bail ou de la remise en location.
Le texte rend également obligatoire la réalisation d’un audit énergétique, incluant des propositions de travaux, avant la vente d’un bien immobilier de logements individuels et de monopropriétés. Cette obligation s’appliquera en métropole le 1er janvier 2022 pour les logements classés F ou G ; le 1er janvier 2025 pour les logements classés E ; et le 1er janvier 2034 pour les logements classés D.
De même, une obligation de réaliser un DPE est fixée à partir du 1er janvier 2025 pour les copropriétés entre 50 et 200 lots ; et à partir du 1er janvier 2026 pour les copropriétés de moins de 50 lots. Pour les immeubles en copropriété de plus de 15 ans, les syndics devront en outre adopter un plan pluriannuel de travaux dédié à la rénovation énergétique et provisionner les dépenses correspondantes dans le fonds de travaux de la copropriété.
Source : actu-environnement.com
Barbara Pompili, ministre de la Transition écologique salue les avancées de la loi Climat et Résilience en la matière : « Le secteur du bâtiment représente un quart de nos émissions de gaz à effet de serre : la solution est connue, il faut rénover, rénover, rénover. Les députés ont voté des avancées qui vont constituer un tournant majeur en obligeant la rénovation de millions de passoires énergétiques, en créant un accompagnement des ménages de A à Z pour faire leurs travaux et en donnant de la visibilité au secteur du bâtiment sur les aides publiques à long terme. C’est une grande avancée écologique et sociale. »
Mais les associations du Réseau Action Climat ont critiqué aussi bien la définition d’une « rénovation performante » qu’ils jugent difficilement lisible que les mesures prises concernant la rénovation énergétiques qu’ils jugent trop peu ambitieuses. En effet, l’intention initiale de la Convention citoyenne pour le climat était de rendre obligatoire la rénovation énergétique pour tous, et non uniquement pour les propriétaires bailleurs.
🕵 Le débat des experts 🕵
Je soutiens une obligation conditionnelle et progressive de rénovation performante en visant des moments privilégiés (mutations des logements individuels, ravalements de façade des copropriétés) et en assurant un reste à charge zéro pour les ménages les plus modestes. Généraliser les rénovations des logements est crucial à la fois pour atteindre la neutralité carbone et pour éradiquer la précarité énergétique.
L’expérience des dernières décennies montre que jusqu’à présent, la constitution d’une offre pertinente de travaux et de financement ne suffit pas à déclencher suffisamment de passage à l’acte des ménages. Même lorsque le nombre de rénovations augmente comme cette année avec MaPrimeRénov’ – je me réjouis que le ministère table sur 700 000 rénovations MaPrimeRénov’ en 2021 – la qualité des rénovations engagées est bien moins satisfaisante que leur quantité, moins de 5% des dossiers étant des rénovations globales et 82% des travaux ne concernant qu’un seul geste, faisant craindre parfois un effet d’aubaine.
Toute passoire thermique devrait être rénovée en 2028
L’incitation ne suffit donc pas, un signal politique fort est nécessaire. Généraliser des rénovations performantes (a minima multi-gestes et dans la mesure du possible, globales) est crucial, en concentrant en priorité les efforts sur les logements les plus énergivores et des plus précaires. Viser dès aujourd’hui des moments privilégiés pour obliger les rénovations me semble le plus adapté : au moment des ventes ou transmissions de logements individuels, lors des ravalements de façade des copropriétés. Par ailleurs, ce signal doit emmener de façon progressive vers l’éradication de la précarité énergétique et un parc au niveau BBC en 2050 en donnant une vision à moyen-terme via un calendrier échelonné : toute passoire thermique (logements d’étiquette F et G) devrait être rénovée en 2028, avant d’obliger les rénovations des logements d’étiquette E et D d’ici 2040.
L’Etat doit garantir un reste à charge zéro pour les ménages les plus modestes, afin que cette politique soit juste et efficace
Par ailleurs, alors qu’Emmanuel Macron promettait dans son programme en 2017 l’interdiction de location des passoires thermiques en 2025, la loi climat va beaucoup moins loin et déclare seulement comme indécents les logements loués d’étiquette G en 2025 et d’étiquette F en 2028, ce qui n’empêchera pas les locations de ces logements tant que le locataire ne se retournera pas en justice contre le propriétaire. Enfin, l’accompagnement des ménages doit être relatif à leurs moyens : je considère que l’Etat doit garantir un reste à charge zéro pour les ménages les plus modestes, afin que cette politique soit juste et efficace. »
Haut Conseil pour le Climat, Convention Citoyenne pour le Climat, mission d’information parlementaire… les alertes sur le décrochage de la France entre les objectifs fixés et les résultats en matière de rénovation énergétique n’ont cessé de
se multiplier ces derniers mois. À l’origine de cette inertie : la politique publique de rénovation énergétique basée sur l’incitation des ménages à réaliser des gestes de travaux dispersés.
Sans obligation de rénovation, la transition climatique est vouée à l’échec
Pour respecter la trajectoire de réduction des émissions de gaz à effet de serre de la France, la Convention Citoyenne pour le Climat a conclu que l’obligation de rénovation des logements est indispensable. Cette analyse fait largement consensus comme le montre la lettre ouverte au Président de la République signée en avril dernier par près de 60 acteurs industriels, financiers, syndicats, réseaux de collectivités, think tanks et ONG, demandant la mise en place d’une obligation conditionnelle de rénovation.
Cette obligation doit être performante (en atteignant le niveau BBC rénovation ou équivalent, c’est-à-dire les classes énergétiques A ou B, progressive et dotée de moyens techniques et financiers complémentaires.
Or, la loi Climat et résilience a fait l’impasse, au motif que les dispositifs d’incitation et de soutien des ménages ne sont actuellement pas suffisamment déployés. C’est oublier que, si l’État n’organise pas activement la rénovation énergétique, elle ne se fera pas ! Au lieu de se donner les moyens de préparer sa mise en place d’une telle
obligation, le Gouvernement refuse purement et simplement de la mettre en œuvre !
Un financement intégral impératif pour les plus modestes
Une telle mesure nécessite d’être déployée progressivement, en l’accompagnant de moyens financiers et techniques. Ainsi, un accompagnement doit être systématiquement proposé aux ménages pour leur permettre de sélectionner une
offre de travaux adaptée, des aides, des prêts bonifiés… Elle doit profiter à tous les ménages, quels que soient leurs revenus. Un financement public intégral est même impératif pour les ménages les plus modestes.
Dans ces conditions, loin d’être punitive, l’obligation représente une opportunité pour améliorer le confort, le pouvoir d’achat et la qualité de vie.
Il est possible et nécessaire de fixer ce cap, pour lutter contre la précarité énergétique et respecter nos engagements climatiques !
Sacré. À l’obligation de rénovation, j’opposerais ce terme. Sacré, parce que le siècle des Lumières nous a légué un qualificatif au droit de propriété, inscrit à l’article 17 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen. Il s’agit pour moi d’une première barrière, et non des moindres, à cette obligation de rénovation, qui va à l’encontre du droit de propriété, qui dispose d’une valeur constitutionnelle depuis la décision du Conseil des Sages de 1971.
À une obligation simple et aveugle de rénovation, qui serait inconstitutionnelle, nous privilégions d’autres mesures en même temps incitatives et coercitives
À une obligation simple et aveugle de rénovation, qui serait inconstitutionnelle, nous privilégions d’autres mesures en même temps incitatives et coercitives. Pour relever le défi de la rénovation énergétique en France,
nous œuvrons sur la base du triptyque information – accompagnement – financement. L’objectif : ne laisser aucun citoyen sur le bord du chemin et garantir à tous un logement décent tout en réduisant son impact sur
l’environnement.
Car oui, le bâtiment représente aujourd’hui 25% des émissions de gaz à effet de serre et près de 45% de la consommation d’énergie en France. Avec le nouveau diagnostic de performance énergétique (DPE) ou l’audit énergétique rendu obligatoire pour la vente de passoires thermiques, les locataires, propriétaires ou futurs acquéreurs, auront pleinement connaissance des caractéristiques environnementales de leur logement.
Cependant, un audit ou un diagnostic ne saurait être suffisant pour informer les ménages. C’est pourquoi nous avons créé, dans la loi climat et résilience, des guichets uniques d’information sur tous les territoires, urbains comme ruraux. Tous les Français pourront ainsi bénéficier de la meilleure information, gratuite et fiable, sur les démarches à entreprendre pour rénover leur bien.
Rétablir la confiance entre les différentes parties prenantes demeure la clé de notre réussite collective
Une fois informés, les propriétaires seront accompagnés, par un nouveau dispositif également issu de la loi climat et résilience : « l’accompagnateur rénov’ ». Des professionnels agréés par l’Etat pourront accompagner les propriétaires dans le parcours complexe mais essentiel de la rénovation, en étant présent du début à la fin du projet de rénovation. Rétablir la confiance entre les différentes parties prenantes demeure la clé de notre réussite
collective.
Enfin, parce que la rénovation a un coût, qui ne doit pas constituer un obstacle, nous avons d’ores et déjà lancé des dispositifs tels que Ma Prime Rénov, qui connaît un succès sans précédent. D’autres aides peuvent être
octroyées aux propriétaires, à travers la mobilisation d’Action Logement ou des certificats d’économie d’énergie. À ces dispositifs existants, de nouveaux vont s’y ajouter, comme le « prêt avance mutation », qui permettra de financer les travaux en repoussant le remboursement au moment de la vente du bien.
À l’obligation de rénovation énergétique, nous répondons par ce triptyque, faisant de chaque propriétaire un acteur au cœur de la transition écologique. Nous levons ainsi l’ensemble des freins à la rénovation et nous nous donnons les moyens d’atteindre les objectifs ambitieux que nous nous sommes fixés, face à l’urgence climatique qui s’impose à nous. Pour cela, nul besoin donc d’obliger ni même de porter atteinte aux droits fondamentaux de
nos concitoyens.
Malgré nos recherches, nous n’avons pas pu trouver de contributeur pour défendre cette thèse. Si vous êtes compétent et légitime ou que vous connaissez quelqu’un qui l’est, n’hésitez pas à nous contacter : contact@ledrenche.fr