Chaque mois, pour chaque numéro, deux étudiants en partenariat avec Eloquentia débattent d’une question plus ou moins fondamentale… Le but est de réaliser un exercice d’éloquence et de débat par écrit. Nous les publions maintenant en ligne !
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Oui, l’extrême droite peut passer l’arme à gauche !
A l’évidence oui, l’extrême droite peut passer l’arme à gauche ! Qui en douterait ? Mais ne vous méprenez pas sur le sens de mes propos. Contrairement à ce que vous pourriez penser, passer l’arme à gauche n’a rien à voir avec avaler son extrait de naissance, casser sa pipe ou encore manger les pissenlits par la racine. Non, on vous a menti : la signification de cette expression est plus subtile…
Petite leçon d’étymologie. Depuis nos ancêtres romains (enfin les ancêtres des vrais francais de souche, qui ont donc des ancêtres italiens – allez comprendre) on déteste le côté gauche, considéré comme maudit. La preuve, en latin, gauche se dit sinister qui a donné sinistre. Sinistre comme une arme. Quant au verbe passer, il a donné très passer puis trépasser. Passer l’arme à gauche, ce n’est donc pas mourir mais plutôt passer du côté sinistre très rapidement.
Or qui pourrait douter, ne serait-ce qu’après le débat du second tour de la présidentielle, que l’extrême droite (et sa représentante en titre) peut devenir particulièrement sinistre très rapidement et donc “passer l’arme à gauche” ? Pas moi en tout cas.
Pas convaincu ? Vraiment ? Je vois que la mauvaise foi n’a pas rendu son dernier soupir.
Mais pour me donner le dernier mot, vous admettrez au moins que l’extrême droite a déjà souvent passé larmes à gauches…
Tout dépend du sens dans lequel on considère la situation
Alphonse Allais se demandait lui-même si les gauchers passaient l’arme à droite : question très fondée…
La gauche et la droite sont extrêmement relatives, alors l’extrême-droite ou gauche sont le sont d’autant plus : tout dépend du sens dans lequel on considère la situation.
Et d’ailleurs, pourquoi cette question ? Pourquoi pas : «l’extrême-gauche peut-elle passer l’arme à droite ?». La question n’en serait-elle pas plus … adroite ?
Mais contentons-nous de cette question plutôt gauche, disons-le, et réfutons-là.
Non, l’extrême-droite ne peut pas passer l’arme à gauche.
Imaginons un instant qu’elle disparaisse. Comme ça, un beau jour : pouf, plus d’extrême-droite ! Disparue ! Dès lors, le second parti le plus à droite (je vous laisse insérer ici les noms qui conviendront) deviendrait à son tour… la nouvelle extrême-droite !
Nous venons ici de prouver deux choses : la relativité de l’extrême droite, et son immortalité.
Prenons même un cas extrême (c’est notre sujet) : la Corée du Nord. Ah !, me direz-vous, dans ce pays pas d’extrême-droite ! C’est donc qu’elle a passé l’arme à gauche.
Nenni ! Regardez-bien ce pays, qui, sous des dehors communistes, ne cache qu’un vaste complot pour imposer une nouvelle coupe de cheveux dans le monde entier, mais je m’égare ; de quel côté les soldats, nombreux, portent-ils leur arme ? A droite !
J’espère que cette tribune maladroite vous aura convaincu, voire, vous aura retournés. Mais méfiez-vous, tournez le dos à l’extrême-droite, vous la retrouverez à l’exrême-gauche !