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Une décision à la hauteur de l’intégration européenne
Ophélie Omnes
Avocate, Présidente de l'Union des fédéralistes européens (UEF-France)https://www.uef.fr/
Début 2019, le débat du siège au Conseil de Sécurité des Nations Unies pour l’Union européenne – notamment grâce à la cession du siège français – est revenu sur le devant de la scène, suite aux déclarations du vice-chancelier allemand Olaf Scholz. Loin du grincement de dents que cela a pu occasionner dans les couloirs du Quai d’Orsay, cette proposition doit être chaleureusement accueillie et ardemment défendue, ainsi que nous l’affirmons depuis longtemps.
L’Union européenne : un acteur essentiel des relations internationales
De la signature des traités internationaux à l’imposition de sanctions comme riposte géopolitique, l’Union européenne s’est révélée être un acteur essentiel des relations internationales, qui reste néanmoins dépendant du positionnement de ses Etats membres. A cet égard, bon nombre de citoyens européens estiment que l’Union devrait gérer, au niveau européen, des sujets comme la défense ou la lutte contre le terrorisme. Et pourtant, il ne s’agit pas là de compétences exclusives de l’Union, ni même partagées avec les Etats membres, mais bien d’une compétence laissée au bon vouloir des Etats membres.
…mais dépendant de ses Etats membres
La création d’un siège au Conseil de sécurité des Nations Unies, obligerait l’Union européenne à réaliser les réformes nécessaires pour se doter d’une véritable diplomatie – idéalement menée par un ministre européen des affaires étrangères – qui ferait d’elle un acteur crédible de la scène internationale, et répondrait aux questions du type de celle de Henri Kissinger en 1970 « l’Europe, quel numéro de téléphone ? ».
Une solution pour une véritable diplomatie aux intérêts communs
En outre, ce siège européen à l’ONU se doit d’être issu de la transformation de celui de la France, qui devra accepter de laisser sa place au profit de l’intérêt commun. A l’heure où le Royaume-Uni est sur le chemin de la sortie, et où le couple franco-allemand s’est engagé à prendre de concert les décisions en matière de défense, la France doit prendre ses responsabilités et être à la hauteur de l’intégration européenne qu’elle semble prôner plus que jamais.
Il est grand temps de délaisser les égoïsmes nationaux, souvent à l’origine des conflits que les Nations Unies ont pour mission d’éviter, pour œuvrer à la mise en place d’un nouvel ordre international véritablement capable de promouvoir le multilatéralisme et la résolution pacifique des crises.
Une fausse bonne idée : attractive mais contreproductive
Hajnalka Vincze
Chercheuse senior, Foreign Policy Research Institute (FPRI)http://www.hajnalka-vincze.com/
Il serait désirable de voir une Europe qui parle d’une seule voix, et qui serait ainsi capable de faire le poids dans les affaires mondiales. Mais cela n’arrivera pas, comme par magie, en fusionnant les sièges des Etats-membres au Conseil de sécurité des Nations Unies. Au contraire, un tel siège ne ferait qu’affaiblir l’influence mondiale de l’Europe.
S’il n’y a pas de position européenne commune, l’Europe n’aura aucune voix.
L’unanimité reste la règle à respecter pour aboutir à une décision européenne dans le domaine très sensible des politiques étrangère et de sécurité. Mais les Etats membres ne sont pas d’accord sur les enjeux géopolitiques majeurs, comme la Russie, la Chine ou le Moyen-Orient. En conséquence, l’Europe disposant d’un siège unique au Conseil de sécurité de l’ONU serait en grande partie réduite en silence.
S’il n’y a pas de position européenne commune, l’Europe pèsera moins dans le vote.
L’ONU est une organisation intergouvernementale, où un siège est égal à un vote. Actuellement, 5 pays de l’UE siègent au Conseil de sécurité (deux membres permanents avec un droit de veto, la France et le Royaume-Uni, plus 3 membres non-permanents). Si un accord commun est atteint, cela signifie 5 votes au lieu d’un seul.
La situation actuelle est la meilleure des deux possibilités.
Les Traités européens engagent déjà les Etats membres à défendre les positions de l’UE au Conseil de sécurité. Si une position commune existe, comme sur le changement climatique par exemple, elle est défendue par le maximum de votes et présentée par le Haut Représentant de l’UE pour les affaires étrangères et la politique de sécurité. En revanche, s’il y a un désaccord au sein de l’UE, les européens du Conseil de sécurité gardent leur liberté d’agir. C’est de cette manière que la France a pu s’opposer à la guerre en Irak en 2003.
Une absurdité juridique, politique et démocratique
Selon la Charte des Nations Unies, seuls les Etats peuvent être membres. Aussi selon les Traités européens, la politique étrangère commune ne peut pas affecter la participation des Etats membres au Conseil de sécurité. En termes strictement juridiques, il n’y a aucune raison de le débattre.
En ce qui concerne la politique, la poussée des Etats de l’UE pour un siège unique européen au Conseil de sécurité vise principalement à priver leurs pairs de leurs privilèges, en particulier la France qui est le membre permanent du Conseil. Cela pourrait néanmoins défaire l’équilibre franco-allemand et menacer la stabilité interne de l’Europe.
Finalement, un siège unique au Conseil de sécurité – qui est souvent défendu en parallèle du vote à la majorité qualifiée – priverait les citoyens européens d’un élément crucial de leur souveraineté. Leurs préoccupations spécifiquement nationales (comme notamment les inquiétudes des pays Baltes envers la Russie ou l’ambition française de l’autonomie stratégique) pourraient être ignorées et/ou écartées.
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