📋 Le contexte 📋
Selon le gouvernement, « Début 2020, la France comptait près de 250 000 personnes placées sous main de justice ». Ce terme désigne une personne qui se trouve sous l’autorité de la justice, qui est incarcérée ou alors qui fait l’objet d’une mesure d’aménagement ou d’une peine alternative. En 2020 en milieu fermé, c’est-à-dire en centre pénitentiaire, 82 000 détenus étaient incarcérés (dont 3,8 % de femmes).
Par ailleurs, depuis les années 2000, le nombre de personnes écrouées est en constante augmentation et a presque doublé. « La capacité opérationnelle du parc pénitentiaire français était, au 1er janvier 2020, de 61 080 places, soit un taux d’occupation moyen de 115 %. Le taux de détention est de 103,5 détenus pour 100 000 habitants, ce qui place la France dans la moyenne européenne », précise le site d’information Vie publique. En outre, le site rapporte que plus du tiers des détenus présentent des troubles psychologiques ou psychiatriques, et que le nombre de suicide par an en prison s’élève à plus d’une centaine.
Considéré par l’Observatoire International des prisons (association de défense des droits de l’homme en milieu carcéral) comme « un mal chronique des prisons françaises », la surpopulation carcérale est un réel problème dans notre pays. À compter du 1er janvier 2021, le taux d’occupation des établissements pénitentiaires était de 103% avec 62 673 prisonniers pour 60 583 places.
En 2022, dans la prison de Chambéry, un taux d’occupation de plus de 180% a été constaté, avec une capacité opérationnelle de 86 places pour 124 détenus. Avec des constats similaires dans les prisons de Bordeaux-Gradignan, Tulle, Limoges, La Roche-sur-Yon, Lorient, Foix, Carcassonne, Nîmes, Perpignan et Tarbes, « au 1er janvier 2022, dix quartiers connaissaient des taux d’occupation supérieurs à 200% », rapporte l’Observatoire International des prisons. Cet organisme affirme également que dans les maisons d’arrêts, où se trouvent les détenus condamnés à de courtes peines de prison ou des personnes en attente de jugement, « le taux d’occupation moyen est de 120%, contraignant deux à trois personnes – parfois plus – à partager une même cellule et plus de 700 personnes à dormir chaque nuit sur des matelas posés au sol ».
Sonja Snacken, experte auprès du Conseil de l’Europe et criminologue belge, considère que « l’on ne traite alors que les conséquences de la surpopulation, et non par les mécanismes ou les facteurs qui en sont à l’origine ». En outre, pour Jean Caël, chargé des questions Prison et Justice au Secours Catholique, « La plupart des personnes incarcérées n’ont pas commis de faits graves. La durée moyenne des peines prononcées est inférieure à un an. Si on continue à construire, on va accroître cette exclusion ». À l’instar de ces propos, de nombreuses personnes estiment que la véritable priorité n’est pas de créer de nouvelles places en prison, mais plutôt de résoudre certains problèmes existant. Ces gens proposent par exemple d’améliorer les conditions sanitaires, et de contrer la surpopulation carcérale grâce à des aménagements de peine et une meilleure gestion des condamnations passables d’incarcération.
Toutefois, cet avis n’est pas partagé par tous. Certaines personnes plaident pour la création de nouvelles places de prisons. Ces derniers placent la sécurité des citoyens en priorité, et appellent donc à l’incarcération davantage de délinquants, afin de lutter contre la criminalité. Marine Le Pen, candidate à la présidentielle certifie que la création de nouvelles places de prison est « un projet absolument nécessaire pour la sécurité ». Là où certains considèrent qu’il s’agit d’une solution, d’autres estiment qu’il faut prioriser d’autres moyens pour améliorer le système carcéral. Débat épineux, la création éventuelle de nouvelles places de prison est intimement liée à la notion de sécurité, ce qui en fait un débat crucial des élections présidentielles.
🕵 Le débat des experts 🕵
Faut-il construire de nouvelles places de prison ? Voilà une question qui revient souvent à chaque fois qu’on parle de l’univers carcéral, de sa surpopulation, de la sécurité à l’intérieur et à l’extérieur des établissements pénitentiaires ou des conditions de travail des agents pénitenciers. Une question tristement illustrée par l’agression d’Yvan Colonna à la prison d’Arles.
En février, j’ai effectué une visite à la maison d’arrêt de Draguignan, en compagnie de la Directrice de l’établissement, et j’ai pu ainsi observer directement et me faire une idée des problèmes inhérents au milieu carcéral.
La question du nombre de places de prison n’est pas anodine, elle dépend d’un choix politique, entre la théorie du garantisme pénal et sa limitation du pouvoir punitif de l’État d’un côté, et l’exigence de sûreté et de sécurité de nos concitoyens d’un autre côté.
Notre priorité doit être d’assurer la sécurité des personnes et des biens, et cela passe par la sévérité des peines
Pour ma part, j’estime que notre priorité doit être d’assurer la sécurité des personnes et des biens, et cela passe par la sévérité des peines infligées afin de dissuader les potentiels délinquants du passage à l’acte et aussi d’éviter la récidive.
Malheureusement, l’option choisie par les différents gouvernements français qui se sont succédés dans le temps a été celle de l’assouplissement des peines ou des mesures alternatives à l’incarcération.
Une option qui cache mal une certaine aversion pour la prison de la part de notre législateur qui, par exemple, l’a conduit à aménager systématiquement les courtes peines.
Pour inverser cette tendance néfaste, le projet pour la sécurité de la France porté par mon parti politique, le Rassemblement National, et par notre candidate à la présidence de la République, Marine Le Pen, traite d’un ensemble de mesures visant à reconstruire en profondeur toute la chaîne pénale.
Ce projet prévoit l’adoption d’une loi de programmation pour la sécurité et la justice afin de rendre disponible 85 000 places de prison à horizon 2028, contre les 60 600 environ d’aujourd’hui.
Il faut trouver une solution au plus vite, en évitant les aveuglements idéologiques
Car la demande de sécurité de nos concitoyens n’a jamais été aussi importante face à des phénomènes inquiétants comme le terrorisme islamiste, la criminalité organisée, française et étrangère, l’aggravation des violences à l’encontre des femmes, l’impunité des mineurs délinquants ou les atteintes aux personnes dépositaires de l’autorité publique ou celles participant au service public.
Une autre mesure de nature à libérer des places de prison serait celle qui prévoit l’expulsion des étrangers condamnés, souvent des récidivistes endémiques et qui représentent environ un quart des détenus.
Selon les indicateurs clés du ministère de la Justice, au 1er décembre 2021, il y avait en France 84 022 personnes écrouées dont 69 992 détenus pour 60 626 places opérationnelles, avec un taux de surpopulation carcérale qui s’élevait à 135,8 %.
Une situation intenable, à laquelle il faut trouver une solution au plus vite, en évitant les aveuglements idéologiques et en remettant au centre de notre action politique la sûreté et la sécurité de nos concitoyens.
Une chose est sûre : il faut en finir avec le laxisme judiciaire, parce que les victimes ne sont pas les délinquants, et si la sanction n’est pas efficace alors elle ne sert à rien !
Note de la rédaction : le choix des personnes mises à contribution pour ce débat a été fait par la rédaction du journal Le Drenche. Prison Insider n’était aucunement informé du contradicteur à la soumission de son texte.
Plus de 11 millions de prisonniers dans le monde. Ce nombre ne cesse de croître. Nombreux sont les pays qui comptent plus de personnes détenues que de places. La surpopulation carcérale entraîne promiscuité, indignité, atteinte aux droits. La construction de nouvelles prisons serait-elle la bonne réponse ?
Prenons les dix dernières années et examinons les réponses politiques apportées en France. En 2013, la Conférence de Consensus travaille à la lutte contre la récidive. Il est alors estimé que le parc pénitentiaire « ne doit pas être augmenté dans un objectif de plus grande capacité d’accueil, mais qu’il doit être qualitativement amélioré ». L’observation est réitérée, en 2017, lors de la remise d’un Livre blanc par la commission sur l’immobilier pénitentiaire : « ce n’est pas la construction de prisons qui permet de résoudre le problème de la surpopulation carcérale. Il faut aussi une politique pénale qui sache se servir de l’outil prison; à bon escient ». En 2021, la commission d’enquête sur les dysfonctionnements et manquements de la politique pénitentiaire française conclut que si la construction est « une facette des réponses possibles pour améliorer les conditions – de travail et de détention – et en finir avec la surpopulation carcérale, elle n’est sans doute pas la mesure centrale pour faire face à cette situation ».
En 30 ans, le doublement des places de prison n’a pas réglé la surpopulation
Quel est le cheminement qui aboutit à ces conclusions ? En 30 ans, le doublement des places de prison n’a pas réglé la surpopulation. Les personnes susceptibles d’être incarcérées sont de plus en plus nombreuses.
Davantage de comportements sont jugés criminels, la définition de certaines infractions est plus large, plus lâche, plus floue. Ce sont les pauvres et les marginalisés qui payent, partout, le prix de la prison. En France, une enquête du Secours Catholique et d’Emmaüs conclut que « la prison fonctionne aujourd’hui comme un mode de gestion de la pauvreté situé à l’abri des regards ».
La construction de prisons répond davantage aux symptômes qu’aux causes. Personne n’en veut près de chez soi. La construction prend entre cinq et dix ans : nouvelle prison, normes déjà obsolètes. Cette politique est coûteuse : la construction et l’entretien représentent des dizaines de millions d’euros chaque année, un budget qui ne cesse d’augmenter.
regarder au-delà des places de prison, c’est dépasser une logique uniquement comptable
D’autres pays font des choix différents. La France compte 105 prisonniers pour 100 000 habitants. Ce taux d’incarcération se situe au-delà de la médiane des 47 pays du Conseil de l’Europe. Il est de 50 en Finlande, de 76 en Allemagne, de 60 aux Pays-Bas. Ces derniers ont diminué le leur de moitié entre 2006 et 2016 grâce à une politique volontariste de dépénalisation d’un certain nombre de délits : un taux élevé n’est pas une fatalité.
Alors, recours excessif à l’incarcération ou manque de places ? Les Nations unies suggèrent une voie : recourir plus largement aux alternatives à l’incarcération plutôt que d’insister sur la construction de prisons qui n’apportent “pas de solution durable”. En somme, la question est simple, la réponse beaucoup moins. Regarder au-delà des places de prison, c’est dépasser une logique uniquement comptable. Pour agir, il faut savoir : Prison Insider met
à disposition une information d’intérêt général pour aider chacune et chacun à se faire sa propre idée.