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Tirons les leçons de ce désastre !
Marie-Christine Vergiat
Députée européenne, GUE/NGLDes dizaines de milliers de personnes défilent un peu partout en France depuis le 17 novembre et même s’il y a eu quelques violences, le plus souvent en marge, l’immense majorité de ces manifestants sont pacifiques.
Plus de 3 500 personnes blessées
Or, le bilan en matière de violences est lourd : plus de 3 500 personnes blessées dont plusieurs dizaines gravement. 198 blessures à la tête, plus de 20 personnes ayant perdu un œil, 5 une main arrachée et même un mort. Les blessures à la tête sont le plus souvent dues aux tirs de LBD alors même que ceux qui les utilisent ne peuvent viser que certaines parties du corps et en aucun cas la tête.
Les victimes sont majoritairement des personnes n’ayant montré aucun signe de violence, y compris des journalistes, voire des passants dont des mineurs.
Dans le cadre du droit de manifester, les autorités de police ne peuvent utiliser la force que dans un cadre strictement réglementé par le doit international car on est à la croisée de deux libertés fondamentales : celles d’expression et d’association. Cela se traduit par ce que l’on appelle l’usage proportionné de la force et donc le respect les principes de finalité, de proportionnalité et de nécessité. Dans un État de droit, les forces de l’ordre doivent limiter les blessures infligées, y compris face à des délinquants, et a fortiori éviter les morts.
Un usage proportionné de la force qui n’est pas respecté
Or, des milliers de grenades et de balles en caoutchouc ont été utilisées (environ 10 000 pour le seul LBD selon le ministère de l’Intérieur). Ce sont donc bien ces armes dites « non létales » qui sont en cause notamment parce que les personnels qui les utilisent, appelés en renfort, ne sont pas formés de façon adéquate et notamment pas dans le cadre de la dissuasion propre à la théorie du maintien à distance.
Une interdiction déjà en vigueur dans d’autres pays européens
On nous dit que ces armes sont nécessaires pour éviter d’utiliser des armes plus dangereuses. Cette réponse n’est pas acceptable.
Les LBD ne sont pas autorisés dans la plupart des pays européens. Les manifestants seraient-ils plus dangereux en France qu’en Allemagne ou en Grande Bretagne ; les casseurs seraient-ils plus violents ? Personne n’y croit.
Il est donc temps pour la France de tirer les leçons de ce désastre et d’interdire ces armes dangereuses, mutilantes et mortifères comme ce fut le cas à Marseille pour une vieille dame qui fermait ses volets.
Un degré de dangerosité disproportionné
Marion Guémas
Responsable des programmes France (police, justice, privation de liberté)
Les lanceurs de balle de défense (LBD) tirent à plus de 300 km/h des balles en caoutchouc dont le diamètre est proche d’une balle de golf. Il s’agit d’armes conçues pour permettre la neutralisation à moyenne distance d’un ou plusieurs individus jugés dangereux, sans recourir à des armes à feu. Introduits en France en 1995, les LBD étaient au départ réservés à des situations extrêmes. Leur caractère supposé non létal a rendu leur utilisation banale et courante dans le cadre d’opérations de maintien de l’ordre et de violences urbaines.
Des risques prouvés par les médecins
Ces armes ne sont en réalité pas sans danger, comme en témoignent les articles publiés dans des revues médicales qui ont mis en avant leurs risques, en particulier en cas d’impact au niveau du visage. Des médecins mettent également en garde contre les risques provoqués par un tir de balles en caoutchouc au niveau de l’abdomen et de la poitrine, notamment lorsqu’il s’agit de tirs à courte distance. En effet, de tels tirs peuvent causer des blessures graves aux organes internes et provoquer des contusions pulmonaires sévères pouvant entraîner le décès, comme ce fut le cas en 2010 à Marseille. D’autres décès ont été répertoriés à l’étranger.
Entre 2004 et juillet 2018, l’ACAT a recensé près de 50 personnes blessées grièvement par un tir de balle de défense. Parmi elles, plus de la moitié avait perdu en totalité ou partie l’usage d’un œil, notamment à l’occasion de manifestations. Dans le rapport que nous avions publié en 2016 (L’ordre et la force), nous observions également que 30 % des victimes recensées étaient mineures et plus de la moitié était âgée de moins de 25 ans.
Des modèles non adaptés à des situations de foule
Les LBD sont essentiellement utilisés lors d’opérations de contrôle de l’espace public telles que manifestations, opérations de maintien de l’ordre ou échauffourées avec les forces de l’ordre. Pourtant, dans ces situations de foule, qu’il s’agisse du Flashball Superpro® ou de son cousin le LBD40®, réputé plus précis, la visée est rendue difficile par la distance et le mouvement des personnes ciblées. Les tirs dans ces contextes occasionnent beaucoup de victimes pour lesquelles les conséquences sont dramatiques. Quelques mètres ou un mauvais angle suffisent à entraîner un dommage irréversible, y compris sur une personne qui n’était pas initialement visée.
Parce que ces armes ont démontré un degré de dangerosité totalement disproportionné au regard des buts en vue desquels elles ont été conçues, l’ACAT recommande que les LBD ne soient plus utilisés par les forces de l’ordre. Elle demande leur retrait immédiat des armes en dotation.
Un maintien indispensable
Depuis des mois, le LBD est sous le feu des critiques sous prétexte que cette arme de défense intermédiaire serait responsable de graves blessures infligées aux manifestants. Avant de se placer sous l’angle des conséquences, encore faut-il s’interroger sur les causes de l’emploi.
Aucun policier ne fait usage de cette arme intermédiaire sans raison et hors cadre légal. Les forces de l’ordre ne l’utilisent que pour se défendre d’agressions violentes à leur égard – jet de projectiles multiples au moyen de lance pierres, projection d’acide, utilisation de mortier etc.. – Le LBD est une arme non létale, de défense, sans elle, les casseurs ou manifestants violents se retrouveraient en contact direct avec les policiers engendrant beaucoup plus de risques de blessures de part et d’autres.
Une utilisation approuvée par le Conseil d’Etat
La meilleure façon de ne pas être blessé, est de ne pas se maintenir dans un attroupement après les sommations de dispersion ou dès lors que les premiers affrontements débutent.
D’ailleurs le Conseil d’Etat ne s’y est pas trompé, puisqu’il a rejeté le référé-liberté introduit visant à obtenir la suspension de l’usage du LBD 40 lors des manifestation reconnaissant objectivement que cette arme demeure particulièrement appropriée pour faire face aux situations de violences.
De surcroît le Conseil d’Etat a jugé, que contrairement aux allégations des contradicteurs, l’organisation des opérations de maintien de l’ordre mises en place lors des récentes manifestations ne révélait pas une intention des autorités de ne pas respecter les conditions d’usage, strictes, mises à l’utilisation de cette arme. L’instance suprême administrative conclut que l’usage du LBD ne peut être regardé, comme nature à caractériser une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté de manifester et au droit de ne pas être soumis à des traitements inhumains ou dégradants.
La nécessité de manifestations pacifiques
Ainsi au regard de ces arguments, le maintien de cette arme de défense intermédiaire est indispensable pour répondre aux actes de violences envers les forces de l’ordre, qui a ce jour dénombre plus d’un millier de blessés.
Il ne faut pas renverser la situation, ce sont bien les violences exercées contre les policiers et les dégradations qui provoquent la réponse de la Force publique. Dans le cas de manifestations démocratiques pacifiques, ni le LBD, ni aucun autre moyen de défense ne sont employés.
Vous ?
Malgré tous nos efforts, nous n’avons pas pu trouver de seconde personne légitime, compétente, et partante pour défendre ce point de vue.
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