Ce débat a été réalisé en partenariat avec les rédacteurs de Ciné Maccro : un site qui propose une vision hétéroclite du cinéma.
📋 Le contexte 📋
James Bond n’est plus en service et profite d’une vie tranquille en Jamaïque. Mais son répit est de courte durée car l’agent de la CIA Felix Leiter fait son retour pour lui demander son aide. Sa mission, qui est de secourir un scientifique kidnappé, va se révéler plus traitre que prévu, et mener 007 sur la piste d’un méchant possédant une nouvelle technologie particulièrement dangereuse.
Genre : Action Réalisateur : Cary Joji Fukunaga Avec (entre autre) : Daniel Craig, Léa Seydoux, Rami Malek Durée : 2h 43 minutes Sortie : 6 octobre 2021
Daniel Craig campe James Bond pour la cinquième et dernière fois. A titre de comparaison, Roger Moore l’avait déjà joué sept fois, Sean Connery six (sans compter « Jamais plus jamais » qui n’a pas été produit par EON), Pierce Brosnan quatre, Timothy Dalton deux et George Lazenby une.
🕵 Le débat des experts 🕵
Rarement un film de la saga James Bond aura fait parler, et nul doute que cela sera le cas pendant plusieurs années. No Time to Die avait plusieurs objectifs : clore une saga de quinze ans et laisser partir tranquillement le 007 campé par Daniel Craig.
Le premier point est une réelle réussite. Cette ère débutée en 2006 est considérée par de nombreuses personnes comme étant la meilleure de l’agent 007 et également une saga d’action qui fait date dans l’histoire du cinéma. La conclusion de cette saga se devait d’être hors-norme, et elle est. Le film de Cary Joji Fukunaga parvient à résoudre toutes les intrigues entamées dans cette saga, notamment celles du précédent film : Spectre, mais
également celles concernant plusieurs personnages secondaires.
No Time To Die ose, réinterprète le mythe de James Bond, lui donne encore plus de profondeur
No Time To Die ose, réinterprète le mythe de James Bond, lui donne encore plus de profondeur. L’ère Craig méritait bien cela, tant elle avait déjà emprunté des chemins jusqu’alors inédits pour les adaptations des livres de Ian Fleming. Certes, cela ne plaira pas à tout le monde, mais on ne peut que saluer ces prises de positions concernant le scénario. L’ère Craig en dans sa globalité une grande réussite, et soigner sa sortie était primordial, il fallait frapper un grand coup, et c’est chose faite.
Ce personnage de Bond, considéré comme le meilleur, a eu droit à une fin à la hauteur de sa saga. Ce film nous offre un 007 qui marquera le spectateur pour de nombreuses années.
Outre le fait que ce film donne une tout autre dimension au personnage de James Bond et sa saga, il est également important de mettre en lumière la bonne réalisation de ce dernier volet. Scènes d’action immersives, photographie soignée et personnages secondaires plutôt intéressants, sont des points non-négligeables qui fait de No Time To Die une réussite, en tant que long-métrage, en tant que film James Bond et en tant que conclusion de cette formidable ère Craig.
« Sometimes, letting go is hard ». Jamais une réplique ne nous aura paru autant destinée, alors que s’ouvre à peine No Time to Die, nouvel et dernier opus du Bond de Daniel Craig, cette fois-ci réalisé par Cary Joy Fukanaga. Après un Spectre tristement soporifique, syndrome du blockbuster qui à trop vouloir faire ne réussissait quasiment rien, ce nouveau 007 avait une lourde charge sur ses épaules, en devant raviver une flamme à flamme à moitié éteinte dans le cœur des fans tout en tissant malgré tout un lien avec son prédécesseur. Et, de ce simple postulat, No Time to Die en souffre perpétuellement.
Bloqué par un désir de continuité, ayant façonné toute l’ère de Craig par un arc narratif d’ensemble, Fukanaga se traîne plus que jamais l’héritage de ses prédécesseurs comme un boulet, handicapant le récit par des longueurs inutiles lorsque ce dernier est contraint de réparer les erreurs de son aîné. Dans cette logique télévisuelle, chaque enjeu devient presque épisodique, au sein d’une intrigue anecdotique, qui n’aide jamais à contrebalancer cette impression.
No Time to Die n’a t-il pas transformé cette icône stoïque en simple personnage, à même de subir les mêmes émotions que n’importe quel mortel ?
Pourtant, No Time to Die ne démérite pas, et ce dès ses premières minutes prometteuses. Jamais avare en idées comme en concepts, que ce soit devant comme derrière la caméra, il semble pourtant freiné entre ces envies de renouveau et son cahier des charges habituelles. Sur près de trois heures, les tentatives de démystification du mythe James Bond, passant notamment par son humanisation via des codes de soap opera assez éculés, ou les idées
de mise en scène bienvenues, lorsque Fukanaga se place à la croisée des genres, ne parviennent pas à côtoyer harmonieusement les grandes ficelles récurrentes de la saga, un fan-service lourdaud et des personnages secondaires imposées, qui n’ont jamais grand- chose à faire valoir. En cela, les deux répliques de Felix et M représentent bien l’impasse dans laquelle le film se trouve : « the world has changed » (le monde a changé, mais paradoxalement tout est « as usal » (comme d’habitude).
La fin de l’ère Craig pose aussi une question majeure. Suite à cet exercice de déconstruction d’une figure ayant fait ses armes pendant plus de cinquante ans, No Time to Die n’a t-il pas transformé cette icône stoïque en simple personnage, à même de subir les mêmes émotions que n’importe quel mortel ? James Bond reviendra, certes, mais conservera-t-il son aura d’antan aux yeux du public ?